Après Les bruits de Recife et Aquarius, le nouveau film de Kleber Mendonça Filho (coréalisé cette fois avec Juliano Dornelles) ne pouvait que créer l'événement. Ancien critique, le cinéaste n'est visiblement pas de ceux qui se reposent sur leurs lauriers et Bacurau est très différent de ses prédécesseurs. Un vrai film de genre, très référencé (de Peckinpah au Cinema Novo, voire le western spaghetti). Un film fantastique, censé se passer dans un futur proche, mais que Mendonça préfère qualifier d'historique (et il prouve dans les scènes finales de Bacurau). Le mieux est d'en savoir le moins possible pour apprécier à sa juste valeur un film riche de tonalités très différentes, du gore au grotesque, au point qu'il est parfois impossible de déterminer s'il faut en rire ou en frémir. Pour les amoureux d'Aquarius, en particulier, le passage à Bacurau est franchement déstabilisant, surtout que l'entrée en matière est un tantinet laborieuse, le temps de comprendre de quoi il s'agit vraiment. Il ne s'agit pas que d'un film d'action ou d'un western, mais bien d'une oeuvre à fortes résonances politiques (voir le rôle des personnages américains et de la collusion du pouvoir brésilien) et sociales. Très dense et d'une grande opulence thématique, Bacurau peut se révéler une expérience en partie insatisfaisante, faute d'en saisir immédiatement tous les contours. Une fois digéré, le film mérite sans aucun doute une deuxième vision, histoire de mieux profiter de tous ses niveaux de compréhension. Et lire ce qu'en dit lui-même Kleber Mendonça Filho est tout à fait éclairant et passionnant.