Est-ce un film très ou trop ambitieux ? Peut-être un peu des deux. Vouloir à la fois présenter un mélange des genres, glisser un sous-texte militant et mener une intrigue qui tienne la route n'est pas donné à tout le monde, et mon plus grand regret face à un film dont j'attendais beaucoup est qu'il n'ait finalement réussi à maximiser aucun de ces objectifs. Chacun d'entre eux n'est donc rempli qu'à moitié.
Au niveau du mélange des genres, je suis restée frustrée par la liquidation assez rapide de toute cette dimension fantastique que laisse entrevoir la bande-annonce mais que le film n'exploite finalement que très peu. L'image du cercueil débordant d'eau m'avait par exemple beaucoup frappée, de même que cette intrigue autour de la mystérieuse disparition de la ville de toutes les cartes. Mais de la même façon que le film se veut dérouler son intrigue à petits pas pour maintenir un certain mystère, il échoue malheureusement en laissant des parts essentielles de l'intrigue dans le flou.
L'ambition de la dystopie n'est pas à prendre à la légère et l'on attend de qui se prête à l'exercice qu'il nous présente la vision d'un monde possible dans tout ce qu'il a de vraisemblable. Cela passe par un travail de contextualisation, de mise en situation, et donc d'imagination qui manque ici terriblement. Qui sont ces Américains ? A quel jeu se prêtent-t-il ? Est-ce un Call Of dévirtualisé ou un Paint Ball à balles réelles ? Quel est le contexte politique qui a favorisé leur émergence ? A quel niveau d'avancement en sont les technologies et quel rôle la technique tient-elle dans la vie des protagonistes ? Qu'un film aussi militant laisse trouble toute cette zone de théorisation politique du monde futur me semble finalement assez dommage.
Et finalement, on appréciera énormément le message politique transmis et les vertus cathartiques de l'ultime revanche de ces villageois contre une bande de connards que tout le film jusqu'aux dix dernières minutes nous a appris à correctement détester. Mais justement, si on les déteste autant, c'est parce qu'ils représentent tout ce qu'une personne saine d'esprit se doit de détester : autrement dit, ils sont profondément caricaturaux. Ce manque de subtilité dans le traitement très manichéen de la tension politique est regrettable. Mais les dix dernières minutes du film n'en sont pas moins jouissives.
Pour finir sur une note positive, il ne reste pas moins que l'on passe un très bon moment, que la réalisation est de qualité et qu'on nous présente de beaux personnages pour lesquels nous n'hésitons pas à ressentir de l'empathie. Mais pour suivre l'ambition du film, c'est à cette petite communauté elle-même que l'on s'attache, recluse et fermée sur elle-même, mais ultime représentante des valeurs que le Brésil anti-Bolsonaro porte encore.