Une charmante comédie policière de la fin des années 40, trop faiblarde pour avoir traversé les années avec succès, mais qui demeure une petite friandise fort goûteuse pour les amateurs du genre.
A l'époque, il s'agit d'une production à petit budget, pour preuve les deux rôles principaux sont confiés à d'habituels seconds couteaux : Simone Renant (la photographe lesbienne de "Quai des orfèvres") en profite pour se mettre en valeur, tout à fait charmante dans son personnage d'avocate bourgeoise obligée de se décoincer ; je serais moins enthousiaste sur Pierre Blanchar, assez quelconque en détective séducteur d'âge mûr.
Ces deux héros opposés, sur le mode attraction - répulsion, sont réunis de manière artificielle pour mener ensemble une enquête sur la mort d'un vieux notable odieux, en vue d'innocenter sa jeune épouse, dans la ligne de mire de la justice.
Si l'intrigue policière est traitée avec sérieux, le ton est clairement celui de la comédie, et l'humour fonctionne bien, mieux que je ne l'aurais imaginé, avec en point d'orgue une scène de bagarre délirante, aussi hilarante qu'inattendue.
Parlons maintenant de ce qui fâche, et ce qui empêche "Bal Cupidon" (le titre renvoie au nom du dancing local) d'atteindre le statut de standard du genre.
D'abord, il manque une mise en scène solide et inspirée : il s'agit du premier long-métrage de Marc-Gilbert Sauvajon, qui ne tournera que deux ans avant de renouer avec ses autres talents de dramaturge, scénariste et dialoguiste. Le film manque de tenue parfois.
L'autre gros souci réside dans la prévisibilité de l'enquête policière : avec mon regard contemporain, en bon spécialiste du polar, j'ai identifié le vrai coupable lors de sa première apparition à l'écran. J'imagine qu'à l'époque, on avait forcément l'œil moins exercé, d'autant que l'intrigue en elle-même reste bien construite. Mais ça gâche un peu le plaisir.
Un dernier mot sur la distribution des seconds rôles, plutôt réjouissante, puisque Sauvajon parvient à réunir plusieurs bons comédiens (Henri Crémieux, Yves Vincent, René Blancard) et quelques frais minois (Maria Mauban, Marion Tourès), sans oublier l'attachante Germaine Michel dans le rôle de la fidèle domestique n'ayant pas la langue dans sa poche.