Il faudra désormais s’y faire, des films digne d’intérêt échappent aux sorties des salles de cinéma. Face aux velléités des plateformes de VOD qui tentent de bouffer toutes les parts de marché, les gens se mettent désormais à investir dans leur propre installation pour profiter de leur divertissement dans les meilleures conditions, ce que j’ai moi-même fait il y a d’ailleurs quelques années. Et ce n’est pas la psychose actuel des punaises de lit qui me feront changer d’avis. Le cinéma était autrefois une sortie conviviale symbolisant le partage mais l’expérience converge désormais vers l’isolement absolu grâce aux technologies, effets sonores dolby atmos en son surround ou les écrans IMAX de plus en plus géant. Au delà de cette volonté de s’évader du quotidien en s’immergeant au coeur de l’action, il y a également une forme d’individualisme derrière à mettre en corrélation avec l’évolution de nos mentalités dans la société. Des comportements que l’on peut associer aux locations Airbnb sans âme où vous n’êtes accueillis que par une boîte à clé et une bouteille de vin à défaut d’un véritable hôte ou être humain avec lequel partager si ce n’est pas le biais formel d’une boîte de conversation instantanée.
Il y a justement cette idée d’individualisme et de défiance vis à vis des gens dans Barbare. Toute la tension réside dans le rapport entre une femme et un homme devant partager une location en raison d’un surbooking. Une très mauvaise surprise qui laisse présager le pire notamment que cet homme un peu étrange se soit emparé des lieux en forçant la boite à clé. Il pourrait aussi s’agir du propriétaire, le genre dont on soupçonne de planquer des caméras dans les toilettes. Le choix de prendre Bill Skasgard pour l’interpréter s’avère judicieux tant l’acteur à su marquer les esprit pour son rôle de Pennywise dans It. Tess est donc sur ses gardes, prête à répliquer à tout moment tandis que Keith prend des gants avec elle surtout avec les risques d’accusations pour harcèlement. Forcément avec sa gentillesse et sa prévenance, on se dit qu’il est trop bon pour être honnête et on attend le moment fatidique où l’agresseur va révéler son vrai visage en prenant le parti de l’héroïne que l’on soupçonne de ne pas être totalement saine d’esprit. Toute l’intelligence du métrage est d’ailleurs d’avancer masquer et de lancer des suppositions, tout en cachant l’origine de la menace tapit dans les méandres de cette maison.
La présence insidieuse d’une créature sauvage et dégénéré sera rapidement dévoilé au spectateur avant que le réalisateur ne parvienne encore à retourner la situation tout en menant son film vers les cimes de l’horreur grâce à sa parfaite gestion du cadre et de l’espace. Les ténèbres ont rarement été aussi effrayantes à contempler. Etonnamment, le film effectue une brusque transition en cours de récit pour introduire de nouveaux personnages, notamment le propriétaire de la location interprété par Justin Long. Un choix encore très intelligent puisque son physique inspire plutôt la confiance malgré les accusations d’agressions sexuelles qui portent sur lui. On aura même plutôt tendance à les réfuter comme il le fait avec véhémence en fustigeant le caractère misandre de la plaignante. L’actualité nous a aussi appris à nous méfier de la stigmatisation de l’homme blanc à la masculinité toxique propagé par les mouvements féministes. Une prise de position qui force les accusés à se victimiser à la moindre dénonciation dont ils soulèvent le bien fondé malgré leur culpabilité. Puis l’individu dévoile son vrai visage au fur et à mesure de sa plongée dans le souterrain dont il mesure la superficie afin d’en gonfler le prix de vente. La bonhomie affichée par l’acteur s’efface pour laisser entrevoir un comportement lâche, arriviste et odieux, ce qui fait qu’on finit par se sentir au moins aussi con que lui après l’avoir défendu.
Fort d’un répertoire cinéphilique important, Zach Cregger emploi les mêmes éléments que ses prédécesseurs et contemporains pour jouer des apparences et mieux tromper son monde. Il mêle ainsi les origines de la maison à l’histoire d’un serial killer qui vit encore à l’intérieur. Toutes les pistes concordent à semer le trouble dans une atmosphère anxiogène avant que les différentes parties du puzzle ne finissent par s’assembler pour former un tout plutôt cohérent malgré ses nombreuses ruptures de ton enchevêtré au coeur d’un sous-sol labyrinthique et glauque à souhait. Le film soulève également le problème de la gentrification des bas quartiers et l’abandon progressif d’une population qui se cantonne ici à la présence d’un SDF menaçant ainsi qu’à des parias tapis dans l’ombre caverneuse d’une banlieue dévastée. Reste que la société n’a pas fini d’engendrer de nouveaux monstres pour matérialiser cette peur de l’étranger qui animent les foyers confortablement installé dans leurs duvets. L’enfer ce n’est pas que les autres.
Tu veux ta dose de frissons et d’adrénaline pour Halloween ? Rends-toi sur l’Écran Barge où tu trouveras des critiques de films réellement horrifiques, situés à mi-chemin entre le fantasme et le cauchemar.