Rappelons que Quentin Tarantino, non seulement est un grand ami de Harvey Weinstein, mais en fait lui doit toute sa carrière… Et d’aucuns diraient que son rapport aux femmes (à Tarantino) est… “problématique” (selon la formule consacrée). Alors pourquoi une telle exemption ? Est-ce que, dans ce cas-là, mesdames séparent… l’homme de l’artiste ?


Sinon, petit conseil d’écriture : le spectateur fonde son appréciation d’un personnage sur ce qui lui est DONNÉ de ce personnage. Dit autrement : le spectateur n’est pas dans la tête de l’auteur, et donc n’est pas censé voir telle ou telle scène, ou tel ou tel personnage, de la même manière que l’auteur les voit. L’auteur a donc la responsabilité de la CARACTÉRISATION de son personnage ; et ce, non en vue d’imposer sa vision, mais de la partager, de la proposer au spectateur. Que se passe-t-il ici ? On veut manifestement nous faire croire que le personnage masculin est un odieux violeur. Mais que voit-on ? Un type assez lâche, faible, sans ressource, idiot au fond, et donc finalement : inoffensif… Si donc l’auteur est persuadé, que, non non, ce type qui a l’air inoffensif est bel et bien un violeur, alors il lui incombe (à l’auteur) de nous montrer en quoi ; c’est-à-dire de faire un peu plus d’efforts…


Autrement, voici le risque : le basculement de l’identification… Ce pauvre type est manifestement incapable de faire le moindre mal à quiconque ; c’est donc une victime… il ne mérite pas ce qu’elles lui font subir… Ce sont vraiment des salopes… (je ne fais que décrire ce à quoi l’on est conduit à penser, faute de qualité d’écriture)


Enfin, signalons en passant que le genre “vigilante” est un genre au fond fascisant ; cela est connu ; certains réalisateurs en jouent, d’autres pas, ça donne des films qui s’aventurent aux bords de la morale, mais, quoi qu’il en soit, ça fait partie des codes ; c’est avec ça qu’on joue. La question est donc : sont-elles seulement au courant ? Si on leur dit qu’elles officient dans un genre au fond fascisant, vont-elles ouvrir des yeux tous ronds, comme tombant des nues ? Mais quand on emprunte à un genre, la moindre des choses n'est-elle pas de le connaître au minimum, ce genre, afin que le jeu avec ses formes apporte quelque chose ? Autrement, l’“emprunt” n'est-il pas rien d’autre que du pillage ?


Questions rhétoriques auxquelles je suis contraint de répondre pour amener mon point :


portées à ce point d’ignorance de : 1) ce à quoi elles empruntent (Tarantino grand ami de Weinstein ; le genre objectivement fascisant du vigilante) ; 2) ce qu’elles filment (un pauvre type dont rien, dans la caractérisation, ne permet de penser qu’il mérite ce qui lui arrive), il ne peut qu’en découler la chose suivante : ces donzelles donnent dans ce que Freud appelle “l’accomplissement de souhait”. Autrement dit, elles réalisent un fantasme ; mais dans le pire sens qui soit ; c’est-à-dire en niant : le cinéma, l’esthétique, l’histoire, l’art ; plus généralement : l’objectivité elle-même. C’est du pur narcissisme : inculture absolue, refus de l’effort, moralité sélective (Tarantino ça passe…)... Il s’agit simplement de se mettre en scène soi-même, dans des formes reçues comme “cool”, reproduites sans médiation (et donc forcément appauvries – on préfère toujours l’original à la copie…), à seule fin de s’auto-valoriser, et de se contempler soi-même dans cette reproduction appauvrie…


C’est de l’entre-soi pur et simple, ça ne peut parler qu’à un petit cercle très restreint. Tout ça pour dire ceci : cet objet absolument insignifiant ne peut fonctionner que sur la base de : l’idéologie ; il n’y a qu’elle qui rendra aveugle au caractère objectivement nullissime d’à peu près tout ce qui le constitue. A ce titre, je le considère comme instructif du point de vue de l’étude sociologique et idéologique.

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le 10 oct. 2024

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