-En affaires, en sport et ainsi de suite, en haut de l'échelle c'est l'homme qui domine.
-Je vais devenir la meilleure, comme ça je pourrais changer les choses.
Les réalisateurs Jonathan Dayton et Valerie Faris nous entraînent avec Battle of the sexes à travers une histoire vraie ce passant durant les années 70 mettant en avant un match de tennis révoltant et déroutant qui prit une énorme ampleur pour la lutte des sexes entre Bobby Riggs, 55 ans, et Billie Jean King, 29 ans qui se fit en trois sets. Une lutte pour l'égalité féminine dans une épreuve où la suprématie masculine se voulait très misogyne et injuste, et tout cela au départ pour obtenir un salaire égal. Un récit venant d'une époque marquante où les femmes s'attaquaient enfin aux manques d'équité entre les deux sexes. Une représentativité masculine à travers de vieux grabataire machistes, partiales et endurcis enfermée dans la conception de leurs supériorités. Un fait historique légitimement conséquent du monde sportif immoral qui portait sans se cacher atteinte aux droits des femmes, un dommage sans commune mesure dans le pays.
Avant d'attaquer les hostilités il faut bien comprendre que ce n'est pas un film sur le tennis, mais sur la lutte des classes à travers ce sport. Cela à pour mérite de dresser un affrontement de tennis puissant et décisif par la place de la femme dans la société. Le scénario du scénariste Simon Beaufoy est super bien équilibré, jamais ressenti dans la longueur ni répétitif ou cliché, appuyé par des dialogues pouvant paraître ringard et indignant mais totalement dans l'esprit dépeint. Tout au long, nous entendons des hommes relater des faits sur leurs supériorités en se servant de l'anatomie des femmes pour les rabaisser, mais aussi s'attaquer à leurs intégrités, et bien entendu leur intelligence. Des déclarations sexistes prononcées à l'écran devant des millions de personnes faisant rire l'auditoire masculin et scandalisant les femmes. Une écriture entière est décomplexée livrant une belle leçon de vie divertissante à la forte portée.
Battle of the Sexes aborde des événements sérieux et profonds tout en gardant une dose de légèreté et de nuance. L'humour n'est jamais gras et se révèle finement maîtrisé et suffisamment dans la retenue pour ne pas sortir le spectateur de cette réalité mis en place. La trame déroule des scènes drôles mais tout autant révoltante sur la mentalité étroite de l'époque. Un contraste amusant et dénonciateur superbement implanté par les cinéastes Dayton et Faris, qui réussissent même à introniser du romantisme et de la profondeur d'âme dans la relation personnelle amoureuse de l'héroïne. Une relation lesbienne impeccable qui n'en fait pas des tonnes et ne se représente pas par des grandes phrases amoureuses mais par des regards furtifs et discrets qui collent bien avec la mentalité de l'oeuvre. La lutte égalitaire se traduit également par la face cachée des choses et du regard des autres, comme avec Emma Stone forcé de faire semblant d'aimer un homme en public alors qu'elle aime une femme en privé.
Le style intime de la mise en scène offre une cinématographie certes un peu terne mais immersive. Les différents effets sans être parfait sont efficaces et se suffisent à eux-mêmes. L'esthétisme s’harmonise avec le récit raconté et les signes extérieurs de la période. L'ambiance année 70 est réussie agrémenté par de jolis costumes haut en couleur et de belle coupe de cheveux. Aucun soucie de rythme à déplorer, l'action est prenante et intelligemment dépliée dans d'intense confrontation physique avec des raquettes pour armes, et sociales, toujours chargées d’intention et d’énergie. Le match de fin offre un superbe cadre tendu où notre concentration est à son comble.
Battle of the sexes fait preuve d'une distribution à toute épreuve! Les comédiens livrent un travail énorme en incarnant leurs personnages de manière fiévreuse et vivante. Chaque personnage amène beaucoup d'intention à l'histoire et a un impact puissant et émotif. Emma Stone sous les traits de Billie Jean livre selon moi sa meilleure performance. Elle joue le match de tennis le plus important de sa carrière tout en découvrant sa sexualité refoulée, mettant du gaz dans son mariage et de l'ombre sur sa place au sein des féministes. Elle saisit parfaitement la connexion entre la dualité sportive avec King, son personnage public et ses conflits privés. Pourvu de plusieurs coupes de cheveux insolites et d'une paire de lunettes la rendant encore plus sensuelle elle marque les esprits. La coiffeuse Marilyn Barnett (Andrea Riseborough) s'en sort bien face à Stone même si son rôle est bien plus discret en tant qu'esprit libre et tranquille de la troupe.
Steve Carell interprète lui aussi sa meilleure performance. Il incarne Riggs avec une telle aura et un magnétisme dingue. Un charisme total, sous un air aimable et envoûteur d'un regard qui le renvoie dans son chauvinisme le plus total dès qu'il fait son show. Son sourire rayonnant et son esprit tapageur sont habilement délivrés, donnant vie à l’esprit endiablé de Riggs dans une performance toujours juste et irréfutablement parfaite. La dualité entre les deux offres une belle dynamique aux forte proportions servant de base solide au film. Emma Stone apporte de la vivacité au personnage de Steve Carell parfois nuancée et tendre, parfois épouvantable et scandaleux. Il est totalement convaincant et représente le machisme à l'état pur, soutenu par un excellent Bill Pullman qui fait bien le vicelard lui aussi. Mention spéciale au reste du casting qui est superbe et apporte beaucoup de couleur au récit.
CONCLUSION:
Adapté de l'histoire fascinante et vraie des stars du tennis, Billie Jean King et Bobby Riggs, Battle of the Sexes mettent en avant une lutte de pouvoir qui met en colère, amuse, stresse, réjoui, tout en continuant de diffuser un message sociopolitique important, absolument actuel malgré l'époque. Une perle pour tout fan de justice sociale qui n'est pas à proprement parler un bon film sur le tennis mais un magnifique et révoltant message sur l'esprit sportif de l'époque.
Ce film est une évocation commémorative propice et favorable sur l'amélioration obtenue pour les femmes et des écarts qu'il reste encore à gravir aujourd'hui, grâce à d'excellentes performances et une réalisation de Jonathan Dayton et Valerie Faris soignées.