Beaucoup de bruit pour rien par AlexLoos
Entre deux blockbusters regroupant un certain nombre de super-héros, le créateur de Buffy, Dollhouse et Firefly s’est amusé pendant ses vacances, un peu comme il l’avait fait pour Dr. Horrible’s Sing-Along blog pendant la grève des scénaristes. En effet, Joss Whedon s’est enfermé pendant 12 jours avec une bande de potes (Alexis Denisof, Amy Acker, Nathan Fillion, Clark Gregg et d’autres) pour un projet assez ambitieux et ce pour trois choses. Adapter Shakespeare à l’écran n’a jamais été chose aisée, même si beaucoup de réalisateurs s’y sont essayés (plus de 400 films, adapté ou librement inspiré de) pour le meilleur et pour le pire. Ensuite, parce que Kenneth Branagh était déjà passé par là en 1993 et que son film est culte, et considéré comme une des meilleures adaptation de l’écrivain. Et enfin, parce qu’en matière d’adapter William de façon contemporaine, on ne peut que garder en mémoire l’excellent film de Baz Luhrmann. Car oui, Joss Whedon livre ici son propre Romeo + Juliet, c’est à dire un Beaucoup de bruit pour rien à notre époque avec les dialogues d’origine.
Malheureusement pour lui, et dû à ces deux facteurs cités plus haut, Whedon souffre donc d’une double comparaison et va essayer de s’en tirer avec deux choix. L’un de placer son histoire dans un contexte moderne (s’échappant ainsi au reflet de la première adaptation de la pièce de théâtre) et l’autre d’offrir un film en noir et blanc et dans un cadre très restreint alors que le Luhrmann regorgeait de couleurs dans une ville immense.
Pourtant ces deux choix sont discutables. Il faut bien avouer qu’on a un peu de mal à rentrer dans le film de suite. Ca commence par Clark Gregg en costume, sortant d’une voiture, très classe, arrivant dans une villa (celle de Joss Whedon en fait) et se faisant appeler « Don Leonato », le tout en noir et blanc, il y a un décalage certain et on mettra une bonne demi-heure à s’y habituer. Mais force est de constater que malgré ça, l’œuvre de Shakespeare est véritablement intemporelle, et à la base de nombreuses comédies romantiques tout en étant une pièce de théâtre avec une construction assez classique : Claudio (Fran Kranz) tombe éperdument amoureux de Héro (Jillian Morgese) mais Don John (Juan en VF, interprété par Sean Maher) essaye de faire capoter le mariage en faisant croire à Claudio que sa douce a couché avec un autre. Parallèlement à ça, Bénédict (Alexis Denisof) et Béatrice (Amy Acker) jouent à « je t’aime moi non plus ». Quiproquo sera le maître mot de ces 2 heures.
Les deux partis pris sur la réalisation sont un peu osés. Le noir et blanc permet d’éviter un rendu probablement cheap mais donne surtout une ambiance assez particulière, à la fois old-school tout en étant dans l’air de son temps, à l’image de la pièce donc. Mais surtout, Whedon a décidé de mettre en avant ses acteurs quitte à laisser de côté sa réalisation. En résulte quelque chose de très banal, en plan fixe, quoique ses tics d’Avengers reviennent (ces plans obliques qui n’ont rien à faire là…), finalement pour notre plus grand bonheur.
Car Much Ado about Nothing vaut surtout pour la prestation de ses acteurs tous absolument incroyables, avec Clark Gregg en haut du panier mais surtout Alexis Denisof absolument hallucinant. Du coup, bon nombre de dialogues et monologues sont en quasi plan séquences et on ne peut qu’applaudir le débit de parole, le jeu et la coordination de jeu de certains entre eux. Les situations rocambolesques et le jeu en question en font surtout un film très drôle, parfois à la limite du second degré, aidé notamment par la présence du toujours excellent Nathan Fillion en détective un peu simplet.
Si Much Ado about Nothing ne fera pas partie des meilleures adaptations de Shakespeare, il n’en reste pas moins de ce qu’on pourrait appeler une comédie romantique très drôle, avec certaines prises de risques et surtout avec des acteurs tout bonnement excellent. Il ne sortira probablement jamais en salle ici (impossible à vendre, ça sent le direct to DVD) mais n’hésitez pas à y jeter un oeil, ça donnera une occasion de voir le talent de Whedon (en tant que scénariste principalement) et des autres un peu hors contexte.