Beaufort vient confirmer, si besoin en était, l'incroyable vitalité du cinéma israélien, capable de nous offrir en un mois deux films aussi différents (et bons) que La visite de la fanfare et celui-ci. Si dans La visite...le conflit israélo-palestinien était traité en filigrane, ici il est tout simplement absent. Joseph Cedar, le réalisateur, choisit en effet de tirer son film vers une forme d'abstraction. Il utilise à merveille le décor minéral de la forteresse médiévale plantée en plein milieu d'un désert de montagnes, soulignant le poids des batailles passées et de l'histoire auquel est confronté une poignée de soldats. Affrontant un ennemi invisible qui n'existe que par les obus qu'il déverse régulièrement sur le fort, les soldats évoluent dans un entrelacs de tunnels et tranchées, un univers que la mise en scène rend totalement oppressant et claustrophobique, impression renforcée par une musique à la fois solennelle et inquiétante. On est loin des grandes envolées hollywoodiennes et de l'héroïsation : ici les soldats sont partagés entre sens du devoir et toute une gamme de sentiments qui va de la peur à la révolte en passant par l'attente et l'ennui. L'absurdité de la guerre est rendue presque palpable et Beaufort tend ainsi vers l'universalité.