Henry : Portrait d'un serial killer par klauskinski
Petit film indépendant réalisé en 1985 avec trois bouts de ficelle et une caméra, Henry, portrait d'un serial killer, a depuis accédé au statut de film culte. Le film est une plongée ultra réaliste dans le quotidien glauque et sordide de petits paumés au sein d'une ville qui ressemble à un no man's land crasseux. Rien de très séduisant a priori. Et pourtant John McNaughton parvient à nous glacer le sang en filmant un type ordinaire qui tue, ni par besoin, ni par plaisir, ni pour aucune autre raison. C'est son absence totale de motivation(s) qui fait froid dans le dos, et ce refus de toute explication psychologique qui fait la singularité du film, sa grandeur. Le film ne choque pas par sa violence (la plupart des meurtres restent hors champ, seule la bande sonore restant) mais par l'indifférence à la mort que manifeste Henry, sa manière de tuer comme il ferait n'importe quel geste ordinaire. La mise en scène de McNaughton est à l'avenant, faussement anodine : le réalisateur emploie beaucoup le travelling embarqué à bord d'une voiture pour filmer les rues sales et désolées, renforçant avec ces images prises sur le vif, volées- littéralement d'ailleurs puisqu'il n'avait pas d'autorisation pour filmer la ville- l'impression de réalisme; une autre figure de style se détache : un zoom arrière qui élargit lentement le cadre, c'est-à-dire le regard du spectateur, et le force ainsi à s'interroger sur la représentation de la violence au cinéma et sa responsabilité en tant que destinataire de ces images.