À l'heure d'une actualité difficile, marquée par la guerre en Europe, un film abordant un conflit récent et tout autant géographiquement proche débarque sur nos écrans. Belfast peut donc à sa modeste façon nous faire comprendre ce que vivent les familles vivant au cœur d'un conflit en ce moment, en Europe ou ailleurs.
N'ayant rien vu d'autre de Kenneth Branagh, je me contenterai de parler du film en lui-même. Cela tombe bien car Belfast représente l'unique film personnel de l'auteur, le rendant ainsi un peu à part dans sa filmographie. Branagh, originaire de Belfast, nous parle donc de son enfance à Belfast en 1969 et le film transpire de ce fait de réalisme et de vérité. On y voit la guerre civile nord irlandaise à travers les yeux d'une tête blonde qui me rappelle personnellement Allemagne année zéro de Rossellini, dans lequel un petit garçon erre dans les décombres d'un Berlin détruit. On y voit aussi la pauvreté qui frappe cette région à cette époque, l'absence de travail décuplant à cause du conflit, poussant le père et son père avant lui à travailler comme ouvrier en Angleterre.
En adoptant une vision d'enfant, le film n'insiste pas sur le conflit en lui même : ses causes, ses belligérants, ses enjeux politiques... On y voit plutôt ses conséquences sur la vie de quartier et la vie de famille. La famille du jeune garçon est protestante, dans un quartier mixte où vivent encore de nombreux catholiques qui sont la cibles d'attaques, ce qui pourrit tout autant leur quotidien. Cette particularité nous fait comprendre la complexité de la situation, les tensions provoquées par la cohabitation de différentes religions et les questionnements traversant l'esprit des populations concernées.
Le film est donc plus une chronique de la vie d'un quartier marqué par la violence, comme l'excellent Do the right thing de Spike Lee, qu'un film sur la guerre. À l'instar de ce dernier, le film est à la fois marqué par des passages très touchants et des moments très drôles marqués par de grands dialogues humoristiques teintés ici de régionalisme irlandais. Il est aussi dynamisé par de nombreux passages musicaux accompagné d'une BO sixties redoutablement efficace.
Malgré la difficulté pour un film de reposer sur les épaules d'un acteur enfant, celui-ci se débrouille très bien. Le casting toujours d'origine irlandaise est dans son ensemble très bon également. J'émet quand même une petite réserve à ce sujet dans le choix de Jamie Dornan et Caitriona Balfe qui, bien qu'incarnant bien leur personnage, ont un peu trop un physique de mannequin pour leur rôle de petites gens d'un quartier pauvre, ce qui casse un peu avec ce genre de cinéma réaliste.
Enfin, le film profite d'un final vraiment touchant qui a percuté la salle de cinéma de petits vieux que je fréquentais personnellement. Ceci démontre que, sans être parfait, le film a simplement réussi ce qu'il voulait faire, notamment arriver à faire rire et pleurer les spectateurs, finalement à l'image du cinéma irlandais.