Citation de Hazrat Ali
Bon je vais pas vous le cacher, l'industrie cinématographique a pas trop bien vécu le confinement, surtout quand on sait que la quasi totalité de la saison des blockbusters d'été (fin avril/fin juin) a sauté et que le système de production actuel penche plus vers un "on met tout l'argent dans un gros film qui (on espère) va rapporter gros." Fin bref vous l'aurez compris, on est plus ou moins dans la merde et si on veut sauver la moitié des meubles qui restent vaut mieux essayer de retourner au cinéma durant ce mois de juin.
Mais quitte à y retourner autant ne pas aller n'importe où voir n'importe quoi. Déjà, même s'ils ont pris cher, UGC et Pathé survivront à la crise avec l'arrivée des gros Blockbusters, ce n'est pas le cas des petites salles qui en plus d'être souvent délaissées par le grand public, diffuseront ces mêmes blockbusters en retard, si vous y allez privilégiez donc les petites salles qui ouvrent à perte depuis le 22 juin. Il parait évident que Sonic et Invisible Man ont en plus d'avoir été de mauvais films déjà fait leur trou, contrairement à Benni qui doit marcher pour la diffusion des films Allemands à l'international ou "Une sirène à Paris" pour aider le cinéma français.
Voilà donc la mission que je me donne: vous donner envie d'aller voir un petit film allemand pas forcément super diffusé pour en plus sauver le cinéma. Cette critique se fera donc sans spoilers et autres analyses de détails.
Bon déjà comme pour Gravity, Benni revient aux fondamentaux en nous montrant l'évolution psychologique à coup de symbolisme et autres allégories de ses personnages et non en nous l'expliquant (problème récurrent dans le cinéma grand public moderne).
Benni jouit également d'un casting au premier abord complètement inconnu mais qui va vite se révéler aussi impressionnant que n'importe quel grand film qui se respecte. Je pense notamment à Helena Zengel dont je n'ai pas arrêté de me demander si c'était vraiment une gosse colérique tant son jeu d'actrice est convaincant. Et c'est sans parler de Albrecht Schuch et Lisa Hagmeister qui pour un "vrai" premier film marchent du tonnerre..
Au niveau du thème on a tout ce qu'il y a de plus noble avec l'aide à l'enfance. Mais c'est bien dans son exécution qu'il se démarque de ses homologues. Là ou il était facile de se présenter comme un feel good movie avec une méchante maman et un gentil éducateur Benni choisit ici un regard beaucoup plus réaliste et donc beaucoup plus dur. Pas de méchants, pas de gentils, juste un système défectueux face à une jeunesse qui souffre. Benni est de ce fait beaucoup plus dur à supporter que la plupart des films d'horreur tant la souffrance est immense et les ennemis inconnus, rendant l'horreur presque inéluctable, presque impossible à résoudre.
Au delà de ses qualités, il ne faut pas oublier que Benni est le premier film de la jeune réalisatrice Nora Fingscheidt qui démarre plutôt dans le monde du cinéma. Parce que oui quelle grande réalisation que l'on nous propose là! A l'image de sa protagoniste, presque bipolaire quand on y pense: passant de beau moment contemplatif à une réalisation très rythmée, très costaude.
Avec la maitrise de son thème et la gestion juste parfaite de ses acteurs, il devient évident de considérer Benni comme le film du déconfinement et un des plus grands films Allemands de cette nouvelle décennie.