Systemsprenger reconduit le caractère explosif de son personnage principal par une mise en scène qui se plaît à dynamiter la fluidité d’une narration traditionnelle par une accélération brutale du rythme, permise par le montage et la réalisation caméra à l’épaule lancée à toute allure derrière une jeune fille en constant mouvement. Aussi l’instabilité émotionnelle et affective de Benni trouve-t-elle une traduction à l’écran par le geste, par l’image, par la musique, tous les droits conférant à l’ensemble des allures d’œuvre punk incontrôlable et ouverte aux hasards, heureux comme malheureux. Là se tient la qualité essentielle du long métrage de Nora Fingscheidt : sa propension à désamorcer les attentes d’un spectateur certain avant même le titre d’ouverture d’y trouver les habituels clichés du genre, liés à la représentation souvent doloriste et manichéenne de la marginalité. En lieu et place, un refus du discursif et du théorique pour mieux capter les aléas d’un corps couvert de coups mais recouvert de vêtements rose bonbon, apparemment inoffensif, et d’une psyché lancés dans le monde avec une force et violence quasi primales, primitives. La réalisatrice convertit donc Benni en une énergie source de vie et de spontanéité qui greffe au récit et à la démarche artistique une authenticité formidable.
Voilà donc une excellente surprise qui atteste, avec Undine (Christian Petzold, 2020) cette année, la vigueur du cinéma indépendant allemand.