Comment une Série B sortie de nulle part et réalisée à la truelle (c’est filmé avec les pieds, un surjeu au niveau de l’acting qui dépasse l'entendement, une musique au synthé inappropriée, des déguisements dignes d’une kermesse, des scènes surréalistes, des Goblins à la place des Trolls, …) a pu acquérir, plusieurs décennies après son tournage, le statut de “nanar culte”, voir même être catalogué comme étant "l’un des meilleurs pires films du monde" ?
Le peuple est en droit de se poser la question, enfin, surtout celles et ceux qui n’auraient toujours pas eu la chance, que dis-je, le bonheur incommensurable de voir Troll 2 (1990). Car c’est bien de ce film là dont il est question, un nanar sans la moindre envergure, sorti dans l’indiscrétion la plus totale et réalisé par l’italien Claudio Fragasso. Aux manettes de cet improbable documentaire, on retrouve Michael Stephenson, qui interprétait Joshua (l’enfant star), l’un des principaux rôles dans le film. Âgé de 12 ans lors du tournage, c’est à l’orée de ses 30 ans qu’il décide de revenir sur cette incroyable aventure humaine pour certains… et désastreuse pour d’autres.
A travers ce documentaire, on découvre la façon avec laquelle Troll 2 est devenu incontournable et comment certains fanatiques en sont arrivés à lui vouer un culte. On se croirait revenu aux débuts des années 2000, lorsque The Room (2003) a commencé à faire parler de lui à travers des séances de minuit, jusqu’à ce que la folie s’en empare et que des séances en petit comité aient lieu aux quatre coins du globe et obtienne son statut d’oeuvre culte.
Michael Stephenson a sillonné les États-Unis pour réunir tous les membres du film (du moins, ceux qui ne l’ont pas renié) afin de partager tous ensemble leur rapport au film, leurs souvenirs de tournage et surtout, vivre en communion l’ambiance des projections grand public (les membres de l’équipe du film et les spectateurs en trans). On savourera aussi les retrouvailles avec George Hardy (qui incarne le père de famille), c’est d’ailleurs l’un des principaux protagonistes du documentaire. La caméra s’invite même dans son train-train quotidien (dentiste de profession, il s'investit à fond au sein de sa communauté). L’autre surprise du film, c’est lorsque l’on découvre que Claudio Fragasso a accepté de se prêter au jeu des retrouvailles, allant jusqu’aux États-Unis pour assister à des projections spéciales (en présence d’une partie du casting). On en vient même à être gêné de voir le visage du réalisateur se décomposer lorsque, pendant la projection, le public se bidonne à chaque scène (alors même qu’il ne parvient pas à comprendre ce qu’il y a de drôle). C’est d’ailleurs assez triste à voir, car finalement, on comprend assez vite que, 20 ans plus tard, il n’a pris aucun recul vis à vis de son film, contrairement aux acteurs qui finissent par en rire alors même qu’ils pensaient réellement être en train de jouer dans un film d’horreur tout ce qu’il y a de plus sérieux.
Ce documentaire se savoure et on en jubile même, en se remémorant certaines scènes du film. C’est un petit plaisir coupable de rire d’un aussi mauvais film, aussi bien nous, les spectateurs que les acteurs eux-mêmes qui font preuve d’une grande autodérision.
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