Quand on pense Tim Burton, on pense immédiatement :"Ah oui, Edward aux mains d'argent, Sleepy Hollow, Batman Le Défi..." On ne s'attend pas du tout, mais alors pas du tout à voir Big Eyes. C'est pourquoi d'après moi ce film mérite que l'on s'y arrête, bien qu'il suscite deux réactions distinctes. La première est celle que j'ai subie pendant tout le film et même immédiatement après la projection : "Euh... Burton, c'est le réal' on est d'accord ? Parce que là clairement je vois pas du Burton !" Et c'est là tout le problème : quand un réalisateur a habitué son public à un certain type de films particuliers, avec une ambiance, une personnalité très marquée, on est déçu en voyant une production radicalement distincte. Fini le maître des ténèbres éclairées, le virtuose de la noirceur ensoleillée. Alors oui, je suis déçu de Big Eyes parce qu'il ne rentre pas dans l'univers de Burton.
La seconde réaction, plus à froid et moins réactionnaire conservatrice consiste à questionner le choix de Burton. Car oui, a priori, il réalise malgré tout le film donc il a une intention. Et si Burton en avait marre de faire du Burton ? Et si le vieux Tim, du haut de ses 56 ans, avait juste envie de faire autre chose ? Je pense que si tel est le cas, c'est un choix artistique qui, s'il peut être exécré ou adulé, doit être respecté. Cette hypothèse de ma part s'appuie sur une chose : le regard que le film porte sur l'artificialité du monde de l'art, sur la vacuité prétendue de certaines critiques (faisant écho sans le vouloir mais contexte oblige à Birdman notamment). Une phrase de Waltz m'a frappé au milieu du film lorsque sa femme ne peint plus les Big Eyes mais ce que l'on pourrait appeler les Slim Bodies; Waltz lui dit :"Tu changes de mouvance." Peut-être justement Tim Burton est-il en train de changer, lui aussi ?
Pardon ? Je n'ai pas fait une critique du film ? Oh, toutes mes excuses : une belle photo certes, mais un scénario attendu, un jeu d'acteurs qui s'essouffle vite (même Waltz n'arrive plus à convaincre au bout d'un moment, c'est pour dire), le tout emballé par une caméra assez aseptisée. Oui, clairement, ce n'est pas un grand film, mais l'important n'est pas là selon moi, l'important c'est de voir ce que va donner la filmographie de Burton après Big Eyes.