D'Iñarritu, je n'avais vu que Babel, un tryptique intelligent réunissant un casting de premier choix autour d'une idée simple, un fusil à l'origine de nombreux problèmes aux quatres coins du monde. Il fait partie de cette nouvelle vague de réalisateurs qui savent concilier le cinéma engagé avec la grande machine d'Hollywood. Le genre même qui sait se faire applaudir en mettant le doigt où ça fait mal.
Birdman nous dépeint la vie d'un homme sur la pente descendante, Michael Keaton pour ainsi dire dans son propre rôle, de superstar à acteur has-been de Broadway, échangeant sa panoplie de super-héros pour un simple caleçon et vivotant dans l'ombre d'un Robert Downey Jr au succès insolent. Le film est un immense plan séquence, prouesse technique que seul Alfred Hitchcock, dans 'La corde', a su maitriser jusqu'alors. Birdman s'adresse de cette manière aux cinéphiles perdus dans la multitude d'adaptations de comics, sur un rythme opportun de Jazz, écho de Whiplash, nous installant dans un huis-clos feutré, préservés du vacarme consumériste de New York.
L'envers du décor est l'un des thèmes principaux abordés, aussi bien au travers des coulisses d'un théâtre, qu'en dehors de la porte de service elle même où Keaton se trouvera pris au piège, presque nu, tel un vieil oiseau déplumé, à la merci du public. Cet incident le contraignant, dans une scène surréaliste d'anthologie, à sortir de sa zone d'incomfort et renaitre sur scène. Au delà du message poétique où nôtre acteur s'octroie de véritables super-pouvoirs, dans un passage onirique grandiose, Birdman s'interroge sur la condition d'acteur, la gloire et le déclin, la rudimentarité qui se cache derrière le rideau, et la confusion entre apparences et réalité. Mieux, il invite son auditoire à sortir de la salle sans savoir si le rêve s'est arrêté. Car telle est la vocation du plan séquence, à la manière d'une pièce de théatre, vous faites partie de l'oeuvre...
PS: ironie du sort, ce film n'a pas empêché Keaton de revenir dans un Comics 'Spiderman Homecoming' sous les traits d'un autre volatile, le Vautour !