Black, quand le cinéma « bruxellien » met K.O. le cinéma hollywoodien

Photos et critique sur: http://branchesculture.com/2015/11/10/critique-film-black-adil-el-arbi-bilall-fallah


C’est un pic, c’est un choc, c’est une cathédrale de l’hors-norme: Black sort ce mercredi sur les écrans belges. Et derrière ce film d’un nouveau genre (du moins en Belgique), on retrouver deux frères de caméra et ce ne sont pas les Dardenne mais Adil El Arbi et Bilall Fallah (qui signent leur deuxième film après le premier coup de poing qu’était Image). Et à l’heure du « boycott » bien stérile par certains cinémas (mais aiment-ils réellement le cinéma?) frileux et craignant des représailles, le film est bien parti pour faire sa loi. Celle des gangs mais aussi d’un Roméo et Juliette en terres brusseleirs.


La vie n’est pas facile à Bruxelles pour Mavela, 15 ans et d’origine africaine. Ni pour Marwan, même âge et d’origine marocaine. Ici, c’est crève ou marche et si tu ne veux pas d’ennuis, mieux vaux rentrer dans les gangs, bien gentiment. Et te donner corps et âmes. Pour Mavela, c’est direction les Black Bronx. Pour Marwan, les 1080. Marquant leurs différences raciales et haineuses, les deux clans se rassemblent dans leur volonté à inspirer la terreur. Mais seulement, voilà, quel chaos doit-on bien attendre quand un maigre grain de sable vient se glisser dans cette machine infernale à faire le mal et la mort? Ce grain de sable, uni puis désuni, c’est le couple que forment Mavela et Marwan. Pestiférés des temps modernes, leur amour suffira-t-il à faire taire la violence qui les entoure et les nourrit un peu plus chaque jour.


Dès la bande-annonce, le ton est donné: mise en scène survitaminée, acteurs inconnus mais charismatiques, chorégraphie à couper le souffle… Mais vous êtes sûr que c’est un film belge? Affirmatif, même s’il ne le fait pas! Black, c’est le digne successeur de la tension que procurait Image en mille fois plus fort. Dans cette histoire de Roméo et Juliette très clippée et adaptée du livre Black/Back de Dirk Bracke (allez-y répétez les cinq derniers mots dix fois, ça risque d’être drôle), Adil El Arbi et Bilall Fallah n’ont rien laissé au hasard, et encore moins la mise en scène qui a quelque chose de diabolique et d’assez inouï. D’inédit aussi. Pour preuve, dans ce western urbain qui n’épargne rien au spectateur, jamais Bruxelles n’a été filmé de cette manière, nerveuse et absolument maîtrisée, sans faille et témoignant d’un amour pour cette ville qui n’a rien à envier aux villes américaines.


D’ailleurs, dans les mains de ses deux prodiges ambitieux, le cinéma hollywoodien devient ringard. Place au cinéma Bruxellien! Qui apporte une vraie réponse, un jalon certain dans le monde du cinéma belge. Avec bagout, qui plus est, tant on a du mal à croire que les acteurs de cette tuerie cinématographique ont, en fait, été castés dans la rue. Sans nulle expérience et pourtant phénoménaux (Emmanuel Tahon est une révélation entre toutes les autres). Dommage pourtant que la fin soit prévisible à en mourir de rire. Éculée, elle arrive à gâcher un film qui jusque là avait réussi à instaurer une tension perpétuelle, de l’horreur (quelques scènes, notamment un viol collectif, à faire hérisser les poils des plus durs d’entre nous).Black - Adil El Arbi - Bilall Fallah (5) Et si l’on croit volontiers les deux réalisateurs dans leur tentative de crédibiliser leur histoire (en effet, quelque vingt bandes hantent les rues bruxelloises), ils n’évitent pas certains clichés et un manichéisme qu’ils ont bien de la peine à désamorcer. Mais, ça, c’est du détail qui empêche le film d’être le chef d’oeuvre promis. Car Black, c’est une claque de démesure, une démonstration de force inévitable qui met le cinéma à la belge sur orbite!


NB: Ce film, nous avons eu la chance de le voir au Festival International du Film Francophone de Namur. Chance, oui, car quelques jours avant sa sortie officielle le film est victime d’une polémique qui ne lui rend pas honneur. Des cinémas terrifiés (voyez-vous donc) refusent de programmer le film de peur de représailles. Le film serait si violent qu’il exciterait certains casseurs de vitrines de magasin. C’est d’un ridicule sans nom et, surtout, à tenter le diable. Interdire quelque chose qui n’est même pas latent, n’est-il pas le provoquer et l’exacerber?


NB2: Un autre bijou du film, c’est son générique de fin. On pensait le Back to black d’Amy Winehouse inégalable. On s’était trompé. Oscar and the wolf et Tsar B. en ont fait une réinterprétation suprême et un peu Jamesbondesque. Une version qui mériterait de suivre la voie tracée par le « I follow rivers » de Triggerfinger et d’imposer le chanteur au loup hors de nos frontières.

Alexis_Seny
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le 11 nov. 2015

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