“Black Book”, ou plutôt “Black Box”.
Le livre noir en question est l’équivalent d’une boîte noire, qui s’avère si utile pour révéler les circonstances du crash d’un avion, sauf que là le livret messianique dévoile toutes les activités d’un homme, braquant les feux des projecteurs sur la terrible vérité « en sous-sol » des soi-disant héros de la seconde guerre mondiale.
Ce film, l’un des tous meilleurs de Verhoeven, est aussi l’un de ses plus importants.
L’auteur revient là à ses origines, et plus exactement aux atrocités de la guerre qu’il a vues étant petit (il avait 7 ans à la libération), et qui sont le terreau de son cinéma que l’on qualifie trop souvent « d’ultraviolent », jugeant la forme ou l’étalage de violence gratuite sans prendre la peine d’analyser les tourments originels qui habitent douloureusement l’auteur. Tout comme dans « la chair et le sang », Verhoeven dissèque une période historique pour dévoiler des vérités peu appréciables, remettant en question ici ces « héros » de la seconde guerre mondiale.
Pour lui, l’Europe s’est libérée avec des salopes opportunistes qui retournaient au dernier moment leur porte-jarretelles, baisant avec une pourriture de la Gestapo ou un libérateur canadien selon les circonstances (mal) heureuses. Tandis que d’autres, tout aussi putains, se retrouvaient seins nus couvertes de merde au sens propre, alors qu’elles étaient tout ce qu’un pays avait de plus héroïque. On s’est (souvent) trompé de cible semble nous dire Verhoeven. Des héros ont été torturés alors que des enculés ont été acclamés. Des résistants ont tenu leur langue tandis que des enfoirés de traitres déliaient les leurs, léchant tellement les culs des « boches » qu’ils n’arrivaient pas à remettre leurs langues dans leurs gueules. Des qui s’en tirent, des qui ne s'en tirent pas, des qui s’en sortent de justesse, des qui se font tirer dessus, des qui se font tirer en-dedans, au final, tout le monde s’est fait niqué, même ceux qui s’en sortent à la fin. Lessivés par les coups de boutoirs des trahisons qui surgissent subitement et interminablement, notamment par la perte de proches, les vrais héros sont victimes depuis déjà longtemps.
Habilement écrit, le premier visionnage (c’était mon cas avant l’écriture de cette critique) fait revivre le film une fois ce dernier terminé. On fait un rembobinage Recall dans sa tête et on revoit alors des tas de scènes autrement, ce qui est le lot des grands films. Etrangement, Verhoeven n’en fait pas trop pour une fois (enfin, pas autant que dans d'autres de ses films), il lève un peu le pied. Mais son truc à lui, c’est quand même de « montrer », de faire voir, de provoquer, il reste sulfureux, même s’il n’en n’a rien à foutre de défendre sa réputation. Dos à la caméra, une pulpeuse Carice Van Houten se teint la chatte en blond, les jambes écartées face au miroir voyeuriste qui ne reflète là que nos penchants très basiques « d’instincts ». « Je montre », je montre par l’image crue, jusqu’où peut aller une femme qui s’implique dans la résistance, et c’est simplement ...beau.