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"Devenir fou est parfois une réponse appropriée à la réalité" - P. K. Dick_

[Science Fiction (Anticipation, Speculative Fiction, SF Horrifique) / Thriller (T. Psychologique)]

Après l'intérêt - bien qu'il fût passagé et mitigé - que la série du même nom m'avait inspiré, je me suis décidé, ne sachant quoi regarder à me lancer dans l'aventure intérractive de ce "Bandersnatch".

Si la qualité de l'anthologie variait dans mon estime suivant les épisodes, ce projet britanique, survivant du style"TechNoire" avait tout de même le mérite de savoir être créatif et, le présent long métrage se voulait dans cette idée d'originalité. Ainsi, Netflix nous proposa ce film vendu comme "intéractif" et aux "multiples fins".

Alléchant, je dois l'admettre. Alors, j'ai tenté l'expérience.

Si apparemment j'ai au début fais tous les mauvais choix parmis ceux proposés, ce qui, normalement aurait dû me créer un chemin vers de nouvelles péripéties, cela m'a très vite refroidie quand mes choix mettaient fin à l'histoire et que sur mon écran deux nouvelles options se proposaient à moi : "revenir à la scène machin-truc" ou "aller au générique de fin".

J'ai alors pris ça pour un scénario créant une boucle-temporelle sans grand intérêt... Après plusieurs retours en arrière imposés j'ai commencé à comprendre, les choix n'en étaient pas. Bien sûr, certains vous amènent à une fin plutôt qu'une autre, mais aucun n'a vraiment d'incidence sur l'univers du personnage.

Le héros (un geek dépressif dont j'ai oublié le nom) rêve de développer un jeu basé sur son roman préféré, une sorte de "livre dont vous êtes le héros". Le soucis c'est qu'il va être influencé par deux entités qui vont lui bousillés sa joyeuse dépression pour la transformer en paranoïa. Le premier c'est l'auteur de la brique que représente le roman qui l'inspire, un esprit malade qui a zigouillé sa femme parce qu'il avait perdu la notion de réalité en pensant qu'une sorte de vilain-démiurge contrôlait l'humanité en lui donnant l'illusion du libre-arbitre et qu'ainsi tous les choix potentiels existeraient dans des vérités parallèles (ouai... ça fait mal au crâne) ; le second, son modèle en matière de programation de jeux-vidéo (lui aussi j'ai oublié son nom et, ayant une flemme colosale de vérifier, je l'appellerais ici "Kevin" (pas besoin de développer)). Kevin donc qui est également faciné par le simulacre que pourrait être la réalité pense à peu près comme l'auteur du bouquin (l'objet de fascination - le "préécieeuuxx") à la légère différence que ce ne serait pas un démiurge qui contrôlerait tout mais une organisation secrète appelée "PAC" (la petite annecdocte-fiction sur Pacman était vraiment bien trouvée, je l'avoue).

Bref, un cul-de-sac compliqué qui en vient rapidement à faire comprendre au spectateur que les choix sont influencés par quelque chose (en l'occurence le scénario - et sûrement l'envie morbide de beaucoup de voir du sang à l'écran) et donc, qu'il n'y a pas vraiment de choix. Chose que l'on comprend très vite si l'on sait observé l'indice laissé par l'équipe de tournage en arrivant dans la deuxième moitié de la première partie du film, une affiche pour le roman du Géant, Philip K. Dick, Ubik.

Un indice trop visible qui m'a je pense enlevé l'intérêt de la chute et rendant prévisible à la fois la morale du film "les choix ne sont des choix que lorsque que l'on a conscience de ce qu'ils impliquent" et surtout le potentiel évolutif de l'histoire caché derrière chaque proposition faite aux spectateurs.

La deuxième partie mène donc au postulat que nous n'avons plus le choix d'avoir le choix et que notre seule véritable décision sera de choisir un concept parmi les deux suivant : d'un côté celui de l'auteur du roman, qui deviendra le démiurge du héros qui se pensera alors comme coincé dans un "bouquin dont vous êtes le héros", en gros une (presque-)mise-en-abîme rappelant Ubik et, de l'autre côté celui de Kevin qui poussera le protagoniste à se croire dans le Truman Show.

La première possibilité conduit à un nouveau choix : tuer le papounet du personnage mettant la faute sur le démiurge ou le laisser se torturer l'esprit en le conduisant à changer sa réalité dans ses souvenirs, ce qui finit par tuer le héros.

La deuxième ne laisse pas le choix et donne une suite prévisible, il tue son paternel sans vous demander votre avis, mais vous demandera par contre ce que vous voulez faire du corps, l'enterrer ou le découper, ainsi soit Machin fini en taule soit il vit plus serein.

Plus une fin bonus (je les ai sûrement toutes explorées du coup...), ou l'on se retrouve dans les bureaux de Netflix où l'on devient le démiurge de la démiurge (une fille qui bosse sur le film), sans grand-intérêt.

Ça partait d'une bonne idée pourtant, le concept était intéressant. Mais le fait que la plus part des choix ne mènent qu'à revenir en arrière pour faire le choix juste au bon dérouelement de l'histoire et ainsi faire comprendre qu'il n'y a pas de choix, que le seul intérêt est de faire choisir au spectateur s'il préfère que le mec dans sa télé l'imagine comme un pseudo-dieu ou comme une organisation secrète. Dans les deux cas ça ne change que le devenir du héros mais ne modifie en rien l'univers dans lequel il évolue, tout au plus nous passons d'une réalité à une autre sans réellement pouvoir les dissocier.

Une oeuvre Dickienne donc, mais un peu maladroite. Je pense que le concept inverse aurait eu plus d'impact et aurait été moins prévisible, je m'explique : faire en sorte que tous les choix aient un impact sur l'histoire (qu'aucun d'entre eux ne vous mette "game-over" comme ça met arrivé 25 fois pendant le visionnage) mais que la chute soit la même à chaque fois, une seule fin pour une infinité de possibilité scénaristique, pour le coup l'impact aurait bien mieux correspondu au propos.

Un demi-contement pour ma part donc... Enfin, est-ce que j'avais vraiment le choix de le regarder ?

ubik48
5
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le 19 déc. 2022

Critique lue 6 fois

ubik48

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