20 mars 1999, Columbine. 16 avril 2007, Blacksburg. 20 juillet 2012, Aurora. Des tueries inexpliquées produites par des êtres déstabilisés psychologiquement. Comment peut-on en arriver là, et y a t-il des raisons à de tels actes ? D'une certaine manière, Blackbird essaye de répondre à ce genre de questions. Sean semble être un ado comme les autres. Sauf qu'il écoute du metal hardcore au lieu d'aimer les hits à la radio. Sauf qu'il porte une veste en cuir cloutée au lieu de s'habiller « à la mode ». Souffre-douleur de son lycée, il écrit une histoire de vengeance virtuelle sur internet. Le jour où la police tombe dessus, sa vie va basculer.

Un homme réalisant son premier film doit forcément prendre des risques pour se différencier des autres, tout en assurant ses arrières en utilisant des codes bien établis. Il est vrai que le récit de Buxton est fait de stéréotypes (parents absents, archétype de l'équipe de hockey). Mais pour dénoncer certaines vérités générales, il faut bien passer par ce genre de schémas pour être le plus juste possible. Ça tombe bien, Blackbird arrive à tenir son propos du début à la fin.

Cette première œuvre réussit dans deux domaines, sans forcément révolutionner les thèmes qu'elle traite. C'est à la fois un récit intelligent sur la prison et sur un système pénal parfois totalement inapproprié. Mais aussi et surtout un douloureux portrait d'un jeune homme (magnifiquement interprété par Connor Jessup) qui apprend la dure loi de la réalité : celle de se fondre dans la société pour être intégré. Mais il y a un prix à cela, qui est de renier son identité et ses convictions qui lui sont propres. Qui est-il et qu'a t-il vraiment fait ? Ce sont les questions que nous nous posons durant le visionnage.

Si nous pensons forcément à la mise en scène de Gus Van Sant (Elephant) lorsque Sean est filmé de dos dans des espaces qui l'étouffent (maison, école, prison), c'est à l'excellent Boy A que Blackbird fait référence lorsqu'il évoque le sujet du repentir et de la réhabilitation difficile après un séjour en prison. L'Amérique est clairement remise en cause vis à vis de sa paranoïa sur d'hypothétiques attentats, mais le spectateur lui, se souviendra d'autre chose. Il aura eu l'impression d'avoir assisté à une vie bafouée et ressortira avec un goût amer. Preuve que le film est une réussite.
Hugo_Harnois_Kr
7
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le 7 févr. 2014

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Hugo Harnois

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