Citizenfour par Hugo Harnois
Wim Wenders peut aller se rhabiller avec Le sel de la terre. Vivian Maier n’aura pas eu la chance d’être récompensée pour son brillant travail de photographe à titre posthume. Aux dernières cérémonies des Oscars, la statuette est en effet revenue à Laura Poitras pour Citizenfour. Concluant sa trilogie sur l’Amérique post 11 septembre, son travail met en image l’une des personnalités les plus importantes de ces dernières années : Edward Snowden, ou l’homme qui n’a pas eu peur de dénoncer les activités d’espionnage de la CIA.
Rien à redire sur le propos (la défense contre vents et marées pour la sauvegarde de nos libertés individuelles), on reproche cependant à ce documentaire son angle d’attaque, trop étroit. Ressemblant à un huis-clos dans une chambre d’hôtel, ce documentaire bizarrement récompensé par un Oscar n’arrive pas à capter son public. Lassé de voir une histoire qu’il connait déjà, ce dernier s’agacera devant des plans interminables et répétitifs sur l’inactivité la plus totale de Snowden. La réalisatrice force son propos et manque d’objectivité en s’attachant exclusivement aux réactions de celui-ci.
D’autres témoins ou entretiens auraient permis à Citizenfour de développer une véritable réflexion sur ce scandale qui est loin d’être fini. Au lieu de cela, les mêmes thèses sont évoquées pendant près de deux heures sans ajouter de relief à l’ensemble narratif. La réalisatrice a néanmoins le courage d’affirmer les valeurs qu’elle croit justes. Militant par l’intermédiaire de la caméra, elle expose comment chaque citoyen devrait se défendre, en refusant la peur et la soumission. Voilà où réside la force de cette œuvre, qui n’empêche pas sa maladresse.