Quel bonheur de découvrir au cinéma ce grand classique de la science-fiction 34 ans après sa sortie, ayant fait définitivement rentrer au Panthéon des maîtres du cinéma Ridley Scott, malgré une carrière un peu décevante par la suite. D'abord, il y a évidemment ce décor, majestueux, magistral, peut-être inégalé dans l'Histoire du cinéma, à la fois inquiétant et absolument sublime, où la pluie tombant sans cesse, le soin apporté aux sons d'ambiance, cette photo crépusculaire sont autant d'éléments indissociables de la mythologie entourant le film. Certains détails ont beau m'avoir échappé, impossible d'envisager réellement l'œuvre sans toute cette dimension technique et esthétique renversante, même si son intérêt ne s'arrête évidemment pas là.
Tous ces éléments ont beau peser lourd (peut-être presque "trop" tant le récit apparaît parfois secondaire), et il a beau ne pas se passer tant de choses que ça, difficile de rester insensible à ce récit inspiré de Philip K. Dick, dont on retrouve les thèmes fétiches et les obsessions, notamment lors de quelques scènes éblouissantes et profondément "humaines", Scott prenant soin de rendre ses Réplicants aussi angoissants que parfois émouvants, le choix des acteurs (notamment Rutger Hauer et Daryl Hannah) étant à ce titre un sans-faute, aussi bien physiquement que dans l'expression complexe de leurs sentiments.
Et comme c'était l'époque où Ridley Scott était un virtuose de la caméra, faisant preuve de beaucoup d'audace et s'appuyant sur des noms légendaires participant activement au statut du film (Douglas Trumbull pour les effets visuels, Giorgio Moroder à la musique), l'expérience devient unique, 50% science-fiction, 50% film noir à travers le personnage de Sean Young, presque aussi séduisante et mystérieuse que les femmes fatales de la grande époque, la partition jazzy accompagnant quasiment chacune de ses apparitions ne trompant pas sur la volonté du réalisateur. Bref, voilà un monument sujet à beaucoup d'interprétations et de réflexions, inégalable à bien des égards : pour l'anecdote, lorsque j'ai compris que celui-ci touchait à sa fin, j'ai eu du mal à l'accepter tant je serais encore resté de (très) longues minutes devant l'écran. Indispensable.