L'histoire de Blue Bayou évoque le cas d'enfants de Corée du Sud adoptés par des Américains, qui, une fois adultes, sont expulsés et renvoyés dans leur pays d'origine. Le film rend compte de cette aberration juridique en suivant Antonio, un américano-coréen, marié à la femme de sa vie et bientôt papa, qui, par un revers de fortune, va devoir affronter les fantômes de son passé. En plus de la casquette de réalisateur, Justin Chon se donne le premier rôle dans cette chronique sociale qui met en lumière une facette méconnue et scandaleuse de la justice américaine. J'ai été séduit par l'aspect authentique du film, souligné par une belle photographie au grain bien marqué et par le cadre rare de la Louisiane. Très proche des visages des personnages, la caméra de Chon s'empare des émotions et des liens profonds qui les unissent. Ainsi, dès le départ, on ne peut que tomber d'empathie pour pour cette famille recomposée (Sidney Kowalske et Alicia Vikander), pour cette Vietnamienne qui croise son chemin (Linh-Dan Pham) et pour ce flic à la paternité complexe (Mark O'Brien). C'est un mélo plaisant et convaincant car très bien joué, et ce, malgré quelques lourdeurs d'écriture et un pathos parfois trop appuyé. Certes, ça faisait longtemps que je n'avais pas pleuré de la sorte au ciné (oui, pleuré !) mais les effets lacrymaux sont tellement soulignés (musiques intenses, visages désespérés, accumulation de catastrophes, réalisme) qu'on se sent un brin forcé et manipulé face aux situations relatées. Mais via les scènes quotidiennes, Chon y insuffle des nuances tendres et poétiques nécessaires à l'équilibre plutôt réussi de Blue Bayou. Les thèmes du choc des cultures, de l'amour filial, des traumatismes du passé, de la pauvreté et de la rédemption forment un ensemble accrocheur et émotionnellement ravageur.