La critique a salué le retour de Woody à une forme plus sérieuse et surtout plus travaillée après quelques escapades au niveau de la comédie « paresseuse » (Midnight in Paris, To Rome With Love). C’est une évidence… La critique a salué aussi l’exposition d’un portrait de femme, émouvante et désespérée, en faisant référence à d’autres portraits d’autres femmes, notamment Alice et Another Woman… Enfin, elle a salué – à juste titre – la performance de Cate Blanchett, très bonne comédienne et irréprochable dans ce qu’on lui demande de faire… On l’aura compris, j’ai pourtant de nombreuses réserves… La première au niveau d’un scénario qui ne m’a pas convaincu du tout et dans lequel je ne suis jamais entré. La progression en parallèle de l’histoire des deux sœurs par exemple me paraît artificielle et sortant complètement le film de son registre (on est là plus proche du boulevard que du drame). Deuxièmement, la mise en scène de Woody (que j’adore par ailleurs) est techniquement réussie mais elle n’apporte que très peu au propos (voir la fin de ma critique). Elle me fait même penser par moments à celle d’Intérieurs, qui était loin d’être une réussite. Enfin, il me semble que le sujet principal du film n’est qu’effleuré. Woody se livre ici – à mon sens – à une étude sur l’escroquerie. Il a déjà très souvent abordé ce thème à travers de multiples variations, depuis Take the Money and Run jusqu’à Match Point en passant par Zelig, Sweet and Lowdown et Smile Time Crooks (entre autres). L’escroquerie du mari de l’héroïne, celle de l’héroïne elle-même, celle du petit ami de la sœur de l’héroïne… et j’en passe. Évidemment, c’est dans le personnage joué par Alec Baldwin (le mari séducteur mais infâme) que Woody semble se décrire lui-même : quelques allusions, notamment à son penchant pour l’adultère et les très jeunes femmes, font plus que nous le laisser supposer… Mais pourquoi avoir traité ce sujet en arrière-plan alors qu’il aurait mérité une exposition approfondie et sans complaisance ? La réponse est dans la question : Woody ne va pas au bout de son propos et l’édulcore tout en faisant semblant de nous donner une réflexion des plus sérieuses. Au total, il transforme un portrait d’homme (qu’il escamote presque totalement) en portrait de femme (projection, quand tu nous tiens !)… C’est habile mais ce n’est ni plus ni moins qu’une escroquerie ultime, et c’est fort dommage… Pour finir tout de même sur une note positive, je saluerai la fluidité de la mise en scène qui rend compte au mieux de la différence de perception entre passé et présent à travers des flash-backs très bien construits, rendant le visionnage du film agréable. Mais l’impression générale est une fois de plus celle d’un ratage partiel.