Chronique du sentiment amoureux : violent et soumis au temps qui passe.
Blue Valentine a tout du déjà-vu, et pourtant. Il narre l'Amour comme rarement fait auparavant. Le récit non-linéaire d'instants de vie, de ces deux amoureux est violant. Le film brille par son réalisme. Le décalage est frappant avec la passion des débuts et la routine lancinante, empoisonnante du quotidien. La mise en scène y est pour beaucoup, les acteurs y sont pour beaucoup. Michelle Williams et Ryan Gosling sont touchants de réalisme, ils sont leurs personnages et on y croit. On croit à ces moments de volupté amoureuse aussi fortement qu'à ces moments où la passion se fane. L'amour est bleu, l'amour est Blue Valentine. Inévitablement, on sait où le couple se dirige, on essaye de comprendre comment, pourquoi ? Qu'est-ce qui fait que l'amour peut foutre le camp aussi vite qu'il arrive ? Y'a -t-il un coupable à blâmer ou juste le temps qui passe et emporte avec lui les amants autrefois unis ? Blue Valentine, c'est l'érosion d'un couple, c'est l'érosion de deux individus opposés. Ils se sont rencontrés, se sont plus, mais au final la cadence n'est plus. Cindy est devenue infirmière et non médecin comme elle le désirait. Lui n'as pas beaucoup évolué socialement, se cantonnant à un petit boulot. Le problème des deux c'est qu'avec le temps, la communication ne passe plus. Elle lui reproche ses regrets, son côté enfantin pendant qu'il lui clame son amour et ne voit pas où est le problème. Ils ne se comprennent plus malgré l'Amour qui subsiste, fort mais plus aussi fort qu'avant. Dans Blue Valentine, l'Amour ne résiste pas au temps. Il existe, mais ne dure qu'un temps. On est pas toujours sur la même longueur d'onde même si on le voudrait fortement. Au final, il n'y a pas de coupable et en chercher un dans Blue Valentine serait nier le propos même du film. Ici, l'Amour fait loi mais le temps passe et on n'y peut rien aussi fort qu'on essaye d'y échapper. "I'm just no gonna do it you know, die. I'm just not." dit-il.
Ce beau projet mérite le détour pour sa beauté. Le couple est immensément crédible. (J'y ai redécouverts des acteurs dont je pensais connaître la palette.) Peut-être aussi parce que le projet leur tenait à cœur (ils y ont mis leur argent, se sont beaucoup investis.) Blue Valentine ne dégage pas un optimisme débordant, et c'est un euphémisme. C'est pour cela qu'il est violent, aussi cruel que beau. Comme l'amour, le film de Cianfrance est sans concession. Pourtant on ne détourne pas les yeux et on se lance dans une fable dont on connait la fin mais dont on veut savourer chaque instants à la fois empreinte d'une complicité infinie ou d'une lassitude effrayante pour les deux amoureux qui s'aiment mais ne savent plus comment faire pour que l'autre l'entende, le comprenne encore. Oui, car c'est peut-être cela l'Amour. Il est violent, sans concession, mais mérite d'être vécu.