On n'a pas toujours sous la main une vie d'artiste aussi étonnante que celle de Séraphine, à raconter. Pierre Bonnard, tout entier dévolu à son art, n'a pas eu vraiment une vie aussi aventureuse et folle que celle du Caravage, pour ne citer qu'un biopic récent d'un grand peintre. Qu'à cela ne tienne, pourquoi ne pas chercher la femme dans l'ombre de Bonnard, et mettre la lumière sur elle ? Le film de Martin Provost est d'un grand classicisme et d'un goût sûr dans les décors et les costumes. On peut lui reprocher un certain manque de prise de risques mais le sujet ne l'imposait pas et ses ellipses temporelles semblent fort appropriées, puisque la vie de Bonnard ne possède pas suffisamment d'aspérités pour le montrer autrement que dans son processus de création et dans le privé, avec tout de même quelques écarts à signaler (un gros, surtout). Le couple Vincent Macaigne/Cécile de France n'était certainement pas une évidence mais leur duo fonctionne parfaitement, dans l'harmonie comme dans les moments de crise. Peindre et faire l'amour, voici de quoi résumer la vie de Bonnard, sans oublier de nous montrer quelques amitiés célèbres, avec Vuillard et Monet, par exemple. Mais il y a Marthe, plus intéressante que son célèbre époux et il est tout naturel que le film penche de son côté, en explorant la complexité de son caractère, qui en fait bien davantage qu'une simple compagne de l'artiste.