Je n'ai pas vu le premier long-métrage de Hafsia Herzi Tu mérites un amour, mais les bons retours (spectateurs, j'entends) qui entouraient la sortie du film, contrastant assez violemment avec sa virulence dès les premières images, m'ont encouragé à me faire un avis, pensant naïvement que la catastrophe escomptée ne pouvait être aussi terrible. Bien m'en a pris.


Non seulement je trouve l'histoire présentée vraiment mauvaise, je ne replace pas dans le contexte d'écriture (métrage semi-autobiographique), certes mais j'ai surtout eu le sentiment quasi-permanent qu'on me prenait pour un énorme abruti a priori consentant. Elle devrait s'adresser aux jeunes, or ils sont pris pour des niais durant tout le long, ceux du film ne suscitent sympathie, ni attachement (si encore ce n'était qu'un défaut d'identification, je passerais l'éponge, mais on ne peut être tolérant face à un tel néant de caractère), tous à claquer, nombrilistes. De plus les séquences censées les mettre le mieux à l'avant sont saupoudrées de dialogues d'une finesse inouïe typé « wesh-wesh la tête-à-ma-mère », ne rendent pas « vraies » (bien que ce soit le but recherché), mais agacent. On ne s'attend évidemment pas à du Flaubert pour un tel film, mais à un minimum de pertinence. Là où dans d'autres films sur les quartiers nord ou la banlieue (prenez par exemple à un certain degré, la seconde partie d'Un prophète), le langage familier avait une part imprégnée et sobre, laissant pour compte le côté abrutissant, or la sauce ne prend ici à aucun instant. On en sort juste lessivé et migraineux, et les gros plans à redondance n'aident pas à se reposer les yeux non plus.


Et hop regardez, gros plan sur les visages des acteurs puis sur les pâtes qu'ils dégustent ; super, trop authentique, trop réaliste, j'en pleure à chaudes larmes !


On ressent là une certaine influence Kechichienne et en rendant compte de mon opinion partagée sur le travail de ce dernier, c'est pas vraiment un compliment...


Même au sujet des adultes, Herzi ne fait rien durant une heure et demie, elle montre une mère confrontée à la corruption de son fils, mais ne dit rien dessus, ne démontre à aucun moment ce qu'elle a voulu faire avec. Si je me réfère au synopsis, elle est censée soutenir son fils aîné arrêté suite à un braquage en attendant son procès, mais que nenni ; on ne voit quasiment rien de tout cela, et lorsque c'est le cas, c'est peu clair, jamais approfondi, et encore une fois, nullement émouvant. C'est regrettable d'autant que Halima Benhamed est la seule actrice dont j'ai trouvé le jeu au minimum convaincant. On passe sans cesse du coq à l'âne pour des intentions que seule la réalisatrice semble comprendre, ce n'est pas comme si le scénario était présenté sous la forme d'un récit non-linéaire.


Le plus gros gâchis du film demeure le personnage de la grand-mère ; on l'identifie dans chaque scène par un running gag (il semble que ce soit censé être drôle) sur Frédéric François, visuel autant qu'auditif. Une idée rigolote sur le papier -à défaut d'un insigne de goût -, hélas sur la bobine le symbolisme est de nouveau raté. On comprend tout à fait les intentions de celui-ci, une certaine "vieille France" semble crever dans un Marseille en pleine mouvance, mais c'est d'une lourdeur institutionnelle et dénué de sentiments, tant la grand-mère est dénuée de personnalité et d'intérêt. A la fin elle meurt, tout le monde semble s'en foutre, au même titre que le procès du fiston, alors que c'est quand même le coeur du récit.


C'est le souci fondamental de Bonne mère : de bonnes intentions, inabouties faute à l'absence de dramatisation totale et à un humour bas de plafond. Les images dans l'ensemble demeurent horriblement laides, en plus de ne rien raconter. Autre chose qui me choque: le temps qui passe nous passe au travers, une fois le film terminé on ne saurait dire sur quel laps de temps il se déroule, ce qui est un comble pour un scénario portant autant sur le milieu juridique.


En somme, un film sans âme, où rien ne décolle. Je vois venir les avis divergents à base de « on voit que tu connais pas la misère à Marseille, dans la vraie vie c'est exactement comme ça, donc c'est bien ». D'accord, en attendant une écriture si bas de plafond et une telle banalisation de la corruption ne font pas honneur à un tel univers. Comme dirait l'autre dans le film : « C'est la facilité, ça. »

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le 9 août 2021

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