Un grand débat intérieur s'était fait il y a quelques jours. Fêter son 2000ème film sur SensCritique ne devait pas se faire en visionnant un navet hollywoodien ou un film mettant en scène Dany Boon. Ayant plusieurs films russes dans mon top de films à 10 étoiles, j'ai misé sur ce cinéma national via un cru aussi méconnu des profanes que vénéré des cinéphiles. "Bouge pas, meurs, ressuscite", avec un titre pareil qui a autant de gueule qu'un Schwarzy sous stéroïde et une incontestable réputation, je tranchais finalement en sa faveur avec, pourtant, en face La Lettre Inachevée de Kalatozov dont Soy Cuba est à mes yeux ce que le Christ est à un catholique. Et dès le début, je sentais que j'allais me plonger dans une expérience cinématographique digne de ce nom.


Pas de mot sur la guerre, sur la situation socio-économique de la Mère Patrie. La seule histoire est celle de cette zone de détention où de pauvres âmes se fréquentent parmi la saleté et la vétusté. Effectivement, le noir et blanc n'aura jamais été aussi crédible pour représenter cette fosse de déshumanisation où l'on en vient à se questionner sur les notions de la civilisation que l'on nous a enseigné à l'école. Putride et cauchemardesque, ces zones de non droit sont le théâtre de vices en tout genre et de l'abandon de chacun à une destinée incertaine. Le Petit Père du peuple a ruiné autant économiquement que moralement son pays. Et comme l'on s'en doutera, c'est la morale qui est filmée de manière frontale.


Mais qu'est-ce que la morale dans un pareil lieu de perdition ? Le troc, le racolage et autres messes-basses dans le but d'amasser un maigre pécule, enfants compris tout du moins pour la vente en public parce que bon faudra pas trop compter sur les parents pour leur offrir un train de vie confortable. Ces gamins, entre deux cours et vagabondages, s'amuseront à diverses plaisanteries ou règlements de comptes dont le point culminant sera le largage de levures dans une fosse pour bien inonder les alentours de matières fécales. Bonjour le raffinement qui, pourtant, nous fait pouffer de rire.


Je ne tâcherai pas d'aller plus loin. Quand je note un film avec 10 étoiles, c'est rare que je parle longtemps car comme l'a dit un moine tibétain, mieux vaut voir que lire et c'est exactement ce qui doit être fait avec Bouge pas, meurs, ressuscite. N'essayez pas d'en savoir trop et plongez vous à corps perdu dans cette fantastique odyssée de deux jeunes au jeu d'acteur tout bonnement fantastique et très touchant. Un drame tragicomique dont la fin en marquera plus d'un. Autant dire que je n'aurais pas pu trouver un meilleur long-métrage pour célébrer mon 2000ème film.

MisterLynch
10
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Juste avec leur nom, ces films vous donnent envie de les voir

Créée

le 25 mars 2021

Critique lue 217 fois

3 j'aime

MisterLynch

Écrit par

Critique lue 217 fois

3

D'autres avis sur Bouge pas, meurs, ressuscite

Bouge pas, meurs, ressuscite
Sasory
9

Critique de Bouge pas, meurs, ressuscite par Sasory

Bouge pas, meurs, ressuscite, c'est typiquement le genre de film qui te reste en tête, et qui te lâche plus.. Tu as l'impression de n'avoir pas spécialement adoré le film, puis, tu y penses,...

le 16 févr. 2012

15 j'aime

8

Bouge pas, meurs, ressuscite
Andy-Capet
4

Des souvenirs d'enfance très orientés, peu lisibles et transparents à la fois.

"Bouge pas, meurs, ressucite" est un jeu. Tout le film est un jeu de mémoire. De mémoire fausse, de mémoire qui ellipse, tronque, qui exagère. Cela fait parti du jeu de la mémoire et du témoignage...

le 4 nov. 2012

5 j'aime

Bouge pas, meurs, ressuscite
renardquif
9

Critique de Bouge pas, meurs, ressuscite par renardquif

-Film d'auteur Russe qui date de 90. Comme tout bon film, les plans fonctionnent grâce à l'électricité de la contradiction : Le film a un côté angoissant, voir un peu moche (les plans sont trop près,...

le 5 mars 2022

4 j'aime

1

Du même critique

Qui veut tuer Jessie ?
MisterLynch
9

Rêvez mieux Messieurs, dames

Depuis un petit temps, je me suis rendu compte à quel point la Nouvelle Vague tchécoslovaque recelait de petites pépites toutes plus fantaisistes et inventives les unes que les autres. Une bien belle...

le 26 juil. 2021

5 j'aime

3

Malmkrog
MisterLynch
4

Que tout ceci est époustouflifiant !

Au démarrage de cette critique, je suis à la fois confus et déçu. Confus parce qu'il m'est bien difficile de mettre des mots sur ma pensée et déçu parce que Cristi Puiu était considérablement remonté...

le 25 juil. 2021

4 j'aime

9

Ménilmontant
MisterLynch
9

Là où tu iras, il n'y a pas d'espoir

Ce n'est que tardivement que j'ai connu Dimitri Kirsanoff dont j'eus le plaisir de faire un démarrage en fanfare dans sa filmographie. Ménilmontant c'est avant tout une entrée en matière d'une...

le 5 mars 2021

4 j'aime

1