Une découverte.
Un film de Duvivier réalisé en 1960, l'année après son remarquable "Marie-Octobre".
C'est l'adaptation par René Barjavel d'un roman éponyme de Robert Sabatier que je ne connais pas.
Ce qui est intéressant dans ce film, c'est le portrait des rues d'un quartier de Paris, Pigalle, au pied de la Butte, dans les années 60. Déjà, on sera surpris par le caractère soft du Pigalle de l'époque par rapport à aujourd'hui … Mais ce qui est bien réussi dans le film, ce sont les plans, de jour ou de nuit, de cette Butte dominée par la basilique, vue du toit où habite "Jojo la terreur".
Ah mais, j'y pense, c'est que je n'ai pas encore parlé de Jojo, jeune désœuvré de 16 ans, qui a fui le domicile parental à cause de sa belle-mère qu'il ne peut pas supporter. Du coup, il traine dans la rue ou sur le toit de l'immeuble où se trouve sa chambre de bonne, vit au jour le jour, se raconte des histoires, grimpé sur le toit, joue les gros bras (qu'il a plutôt fluets), affabule, drague sa voisine qui a bien la trentaine, drague une petite copine de son âge, est maladroit. Bref, je ne sais pas si la description est suffisante pour laisser deviner qu'il s'agit de Jean-Pierre Léaud à peine sorti de son succès dans "les 400 coups".
Le film est auto-centré sur lui qui doit apparaître dans à peu près tous les plans dans le rôle d'un petit con. Je dois dire qu'il est très crédible dans son rôle de petit con. Même, presque trop crédible. Même horripilant. On se demande même comment ça se fait que personne ne se soit pas dévoué pour lui botter le train pour lui remettre les idées dans le bon sens. Finalement, Jojo n'est peut-être pas si crédible, quand je repense à ses sapes nickel chrome, pas vraiment en ligne avec un gus qui traine dans la rue sans le sou.
Mais, ça a un avantage, que Duvivier se focalise sur ce petit con. Car du coup, le spectateur s'intéresse beaucoup plus aux autres personnages du film qui, eux, valent la peine.
Par exemple, sa voisine, Magali Noël, qui est une strip-teaseuse dans un cabaret à Pigalle. Une belle femme, qui a un cœur gros comme ça, encore sur le bon versant de la vie mais pour combien de temps ? L'affreux Jojo en est amoureux mais se ramasse une gamelle, heureusement d'ailleurs, parce que ça m'aurait fait mal …
Il y a Pierre Mondy, un boxeur déchu, qui est un faire-valoir dans des matches truqués. Un "loser" comme on dit en bon français qui trouve assez pratique de se lier avec Magali Noël et se la couler douce.
Il y a cette famille italienne dans l'immeuble où je sentais, de mon fauteuil, les bonnes odeurs de la sauce qui mijotait sur le feu. Avec la mamma (Hélène Tossi) truculente, généreuse comme il se doit : "quand il y en a pour quatre, il y en a forcément pour cinq". Avec sa fille (Monique Brienne que je ne connais pas) mignonne, rêveuse, romantique qu'elle surveille comme l'huile sur le feu, mine de rien. Et, le Jojo, elle l'a jugé tout de suite : c'est pas avec ce Jojo la terreur, qu'elle risque grand-chose, la fillette !
Oui, ben, maintenant que j'y pense, finalement, ce sont ces trois femmes (la danseuse, la mamma et sa fille) qui donnent tout l'intérêt au film dans lequel on ne s'ennuie pas même si le Jojo agace un peu (beaucoup)… Sans oublier les splendides vues de la Butte.