Décidement, je préfère quand Billy Wilder s'attelle au genre du drame-policier, qu'à celui de la comédie. Ariane et La Vie privée de Sherlock Holmes m'avaient laissés de marbre par un humour assez médiocre à mon sens tandis qu'Assurance Sur La Mort m'avait captivé, très bon film noir, tout comme Certains l'aiment chaud.
Ce qu'on remarque immédiatement chez Billy Wilder, c'est ce sens inné du dialogue et du scénario, tout est parfaitement millimétré, l'intrigue se déroule de manière magistrale. Rien n'était laissé au hasard sur ses tournages,aucune place à l'improvisation, comme en témoigne Nancy Olson dans le making-of. Cela pourrait donné un effet trop mécanique au film. Pourtant on est sans cesse surpris par la richesse des dialogues, l'intelligence des tournures, et l'on pourrait extraire dix répliques géniales de ce long-métrage, au bas mot."I am BIG... It's the pictures that got small", déclame Norma les yeux exorbités. Alors, quand le réalisateur met au profit ce don d'écriture au service d'une critique acerbe du système Hollywoodien, mêlant le drame, à la romance et à la comédie, on obtient tous les ingrédients pour un immense chef-d'oeuvre. Et c'est bien là le résultat.
Porté par 4 acteurs magiques, Gloria Swanson, Erich Von Stroheim, Nancy Olson, et William Holden, tous époustouflant de justesse, Sunset Boulevard est un véritable bijou. Traitant d'un milieu où tout est éphémère, l'oubli succèdent à la gloire, le personnage de Norma campe une diva névrosé, détestable de narcissisme, ne pouvant se résigner à accepter le présent, vivant uniquement dans son passé resplendissant de star du muet, figure excentrique et fascinante d'une époque révolue, elle est figée dans le temps, ses expressions faciales toujours exagérées l'attestant. D'abord pour en tirer profit, Joe, scénariste raté finira par être envoûté par cette créature d'un autre âge, paradant au milieu de décors fastueux improbables, et des références aux années folles.
De rebondissements en péripéties nous sommes entraînés au gré de la narration d'un Willis déjà mort, dans cette merveille aux multiples facettes où suspense, horreur, tendresse traversent le spectateur. Sans aucun manichéisme puisque tous les personnages ont leurs faiblesses, le film aborde les thèmes de la folie, de la déliquescence d'une ère, des effets de la machine infernale qu'est l'industrie cinématographique. Du côté technique, à son habitude, Wilder n'effectue pas de prouesse même si un des premiers plans, Joe flottant vu depuis l'intérieur de la piscine, est somptueux, mouvance des policiers l'examinant. On pourra reprocher l'histoire du majordome ancien mari etc... un peu tirée par les cheveux mais une grande partie du scénario étant ancré dans des faits réels, cela renforce encore la puissance du récit. Gloria Swanson était une vraie vedette des 20s tombée dans l'oubli et avait vraiment tourné avec Von Stroheim. "Sunset Boulevard", un titre au sens on ne peut plus clair, et accablant lorsqu'on voit arriver l'ultime scène du long-métrage... Profondément perturbant.
Grand film en somme, qui me redonne envie de plonger dans la filmographie de Monsieur Wilder, avec en priorité Le Gouffre aux chimères et surtout, surtout La Garçonnière.
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