Ce texte n'est pas une critique, pas besoin de me le dire, c'est juste une info sur la fin d'Erich von Stroheim que je croise dans les mémoires d'une Lotte Eisner publiées en français en 2023 par les éditions Marest: 'J'avais jadis une belle patrie'.
Quand la fiction est en deçà de la réalité et l'ironie du sort étonnante?
Eric von Stroheim a joué dans Boulevard du crépuscule un homme dévoué à une grande actrice ruinée dans luxueuse villa...
alors je tombe des nues quand je lis page 294, des mémoires de Lotte Eisner, qu'il a fini entre autres ruiné vivant dans luxueuse villa et finalement entouré d'animaux...:
"Peu avant sa mort, je rendis visite avec Henri (Langlois) à Erich von Stroheim, au château de Maurepas. Le réalisateur y vivait dans un décor féodal avec Denise Vernac, une ancienne actrice qui avait sacrifié sa carrière au génie de cet homme excentrique. Depuis des années, Stroheim, sans le savoir, croulait sous les dettes. Denise le protégeait des créancierspour qu'il puisse garder sa Cadillac blanche aux chromes rutilants, une femme de ménage, un valet, une cuisinière et la décoration fantastique de son château. (...) Des sabres au pommeau ouvragé ornaient les murs, il n'y avait en guise de chaise qu'une selle de cheval brodée avec des étriers devant l'immense table de travail en bois poli, sur laquelle trônait une photo du maître, en jeune cadet, vêtu d'un uniforme blanc. Aujourd'hui chacun sait (sic) que cet aspirant officier de l'aristocratie viennoise n'a jamais fait l'armée et n'était autre que le fils d'un modeste chapelier juif. Cependant , il jouait son rôle si parfaitement et ressemblait si peu à un parvenu ou à un imposteur qu'on est en droit de préférer sa légende. En tout cas, moi, j'y ai toujours cru, même quand tous les faits semblaient la démentir." (Lotte Eisner)
"(...)Déjà à demi paralysé par la maladie, (von Stroheim) était étendu sur un lit d'apparat recouvert de velours rouge, dans une somptueuse robe de chambre de soie noire, avec la célèbre minerve blanche qu'il portait dans La Grande Illusion..."Vos articles à mon sujet sont les seuls qui font preuve d'intelligence(...)Je suis heureux que votre article ne soit pas devenu une nécrologie."
"Deux mois plus tard, le 13 mai 1957, Erich mourait. (...) Ce fut joyeusement burlesque, (...)stroheimesque. Alors que le long et somptueux cortège funèbre avançait vers l'église, (...) il sembla que le défunt dirigeait une dernière fois la mise en scène: un troupeau de vaches quitta sa prairie pour se mêler à la procession silencieuse." (Lotte Eisner, page 295 de 'J'avais jadis une belle patrie' aux éditions Marest, 2023)