C'est un fascinant et intriguant projet que Richard Linklater propose avec Boyhood où, durant douze années, il va mettre en scène ses comédiens pour raconter l'enfance puis l’adolescence d'un jeune garçon élevé par des parents divorcés.
Proposant une longue chronique familiale, le réalisateur de Before Sunset va donc passer toutes ces années à retrouver les comédiens pendant quelques semaines pour tourner un scénario nous faisant vivre les péripéties d'une famille entre divorce, nouveau mariage, amis ou autres étapes, plus ou moins douloureuses, de la vie. C'est là que l'ambitieux projet de Richard Linklater prend tout son sens, apportant une vraie authenticité dans l'évolution des personnages, sachant y apporter une touche aussi intrigante que pleine de vie, surtout qu'il déborde de bonnes idées, tant dans le scénario que la mise en scène.
Malgré l'ampleur du projet, il parvient à rester assez simple et sobre derrière la caméra, laissant les personnages dicter le rythme et les tons du récit. Il nous y immerge et on se retrouve au côté des personnages, à vivre leurs aventures et ressentir avec eux les hauts et bas proposés par la vie. On s'attache facilement, et dès les présentations, aux protagonistes de cette famille, il laisse l'émotion sortir des personnages et créer, peu à peu, une ambiance intimiste et ne manquant pas de charme. Il ne fait jamais dans la complexité inutile, mais peint des portraits creusés et sensibles, alors qu'il démontre un vrai brio pour mettre en scène les moments difficiles de la vie, à l'image du dernier quart d'heure.
Il capte avec brio le contexte des situations ainsi que les modes des époques qu'il décrit, il parvient à faire appel à des souvenirs et dégage ainsi un aspect plus mélancolique, principalement en début de métrage. Avec Boyhood, c'est aussi l'humain qu'il étudie, les liens familiaux et ce qui peut unir les personnages entre eux, avec comme toile de fond le portrait de l'Amérique, souvent désenchanté, que ce soit dans la répercussion des Guerres ou les modèles d'éducation. Le temps qui passe est au cœur du récit et laisse songeur face à ce qu'est la vie, tandis que les comédiens sont tous parfaits, d'Ellar Coltrane dans le rôle principal à Ethan Hawke cherchant toujours à être le meilleur père possible en passant par une Patricia Arquette voyant régulièrement la vie lui mettre des bâtons dans les roues mais se battant toujours.
Avec Boyhood Richard Linklater propose une chronique familiale aussi douce que sensible, et nous immerge au cœur des petites choses de la vie, ses joies, malheurs et aléas, sublimant de très bons comédiens et laissant planer une atmosphère mélancolique, captivante et authentique.