Breaking the Waves par Rawi
Voilà longtemps que je souhaite écrire sur ce film.
Il a une place très particulière dans ma cinéphilie.
Il s'agit de l'un des premiers films issus du "Dogme" mis en place et en pratique par LVT qui remet le cinéma à la recherche d'une épure et d'une vérité sans artifice.
C'est ma rencontre avec Lars, le début d'une relation très conflictuelle avec beaucoup de hauts et de bas, de nombreux "je t'aime, moi non plus" pour finir par un rupture (définitive ?) avec Mélancholia.
Ici, il s'agit d'amour fou, absolu ! Bess aime Jan et se fout de savoir pourquoi. L'Amour ça ne se discute pas et surtout ça ne souffre aucun compromis.
Bess est un coeur pur emprisonné par une communauté du nord de l'Ecosse isolée du reste du monde et hors du temps.
Le film montre que le regard de l'autre rend la frontière quasi invisible entre la bonté et la niaiserie.
On rejoint par là le personnage du Prince dans l'Idiot de Dostoïevski.
Bess est bonne ! Elle refuse certains principes de son cercle religieux qui rend la chair coupable et se rebelle.
Cette rébellion et le fait qu'elle cède à la chair la rend coupable à plusieurs niveaux aux yeux de son entourage, de sa propre mère même.
Seule sa belle soeur Dodo (incarnée par la regrettée Katrin Cartlidge) la comprend. Le fait qu'elle est une étrangère, une pièce rapportée à la communauté n'est pas sans conséquence de ce point de vue.
Bess est trop pure, trop naïve, trop humaine pour accepter la rigueur désincarnée imposée par les vieux sages. Son coeur et son Dieu la pousse à donner libre cour à son Amour et va jusqu'au sacrifice suprême.
Tous les ingrédients du mélodrame classique sont réunis. Lars Von Trier le sait et s’engouffre dans les codes jusqu'à les transcender. avec un culot et une sincérité peu communes.
Le grain de l'image rend les personnages encore plus proches de nous.
La carte maîtresse du réalisateur est donc le charisme de ses acteurs. Emily Watson en tête qui incarne une Bess habitée, hantée même à la fois par son Dieu et son amour. Dans son style pseudo documentaire, le grain lourd et la caméra à l'épaule, Lars ne la lâche pas, il lui colle au visage et à la peau. Quand elle parle avec son Seigneur, qu'elle répète qu'elle est une bonne fille. on est dans ses yeux.
Les thématiques chères à Lars von Trier. ici, déjà on sent que la sexualité est la pire des humiliations.
La façon dont Bess croit sauver son mari est significative de cette position.
malgré ses côtés excessifs évidents, la puissance du récit et des personnages m'a émue.
Et si la vérité du coeur était la seule « raisonnable » ?