Comme quoi le cinéma coréen n'arrêtera jamais de nous prendre aux tripes. Avec des films excellents comme My Dear Enemy pour son histoire d'amour ou Memories of Murder pour son enquête policière, voici un autre monument du 7e Art nous venant de Corée du Sud.
Premièrement, il faut noter que le sujet de ce film est profondément inquiétant, rappelant à quel point la société coréenne est foncièrement patriarcale (comme A Cappella l'a aussi démontré), ce qui a pour conséquence que beaucoup de familles sont brisées à cause d'un père violent. Le personnage principal, magnifiquement présenté dans les premières secondes toutes pleines de violence, est un produit d'une enfance complètement gâchée par un père alcoolique et battant sa femme, ne pouvant que regarder sa mère essayant tant bien que mal de s'en sortir. Le fait d'avoir perdu sa mère et sa soeur, ses seules attaches réelles, l'a donc mené à devenir une brute pouvant exploser à tout moment, d'où son job.
Cela n'empêche pas du tout de se sentir proche de ce dernier, au contraire, et ce grâce à la mise en scène virtuose de Yang Ik-June, qui fait de son personnage au regard perdu un pur martyr qui n'arrive plus à s'exprimer que par les coups. Même son neveu, il ne réussit pas à le toucher autrement qu'en le tapant légèrement, car il n'a jamais connu autre chose.
La rencontre avec la jeune lycéenne est donc le début de sa métamorphose annoncée. Le fait que les deux s'appellent par des termes comme "petite conne" ou "connard" montre à quel point ils ont toujours baigné dans la violence, tant verbale que physique. Ce personnage féminin est d'ailleurs, à mes yeux, le plus remarquable, l'actrice réussissant à transmettre des émotions de joie malgré un lourd passé qui ne cesse de lui être rappelé.
Le sacrifice final est en même temps surprenant et inévitable. En effet, le frère de la fameuse lycéenne étant un être ne semblant être fait que de brutalité, ce dernier se lâche sur le protagoniste principal car ce dernier a fini par laisser tomber ce job dénué de tout sens. Mais vu que pour le premier, il n'y a de sens que dans la violence, il ne parvient à exprimer son désarroi qu'en bastonnant son mentor à mort. Ce dernier, à l'aube d'une nouvelle vie, a dû payer pour que ses proches se voient rassemblés. Ce destin funeste rappelant une tragédie shakespearienne paraît donc presque nécessaire, le héros sa faisant assassiner par ce qu'il était dans le passé, tout en ayant compris pourquoi il ne l'est plus.