Silent mourning
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Bien avant les formats larges et les spectacles épiques aux quatre coins du monde qui firent sa gloire, David Lean signe avec ce film d'une modernité de ton impressionnante un drame intimiste bouleversant.
Lean, qui livrera par la suite de magnifiques histoires d'amour (Docteur Jivago en tête) est bien conscient que ce sont parfois (et peut-être le plus souvent) dans les situations les plus communes qu'on trouve les plus grands drames et les émotions les plus intenses; il réduit donc volontairement le spectre de son film pour en augmenter du même coup la portée universelle.
Nous n'assisterons pas à une passion déchaînée, mais bien à la naissance avouée à demi-mots mais d'ores-et-déjà morte-née d'un amour impossible et pourtant si banal, d'une brève rencontre entre deux êtres banals.
La force de ce film réside donc dans son unité de temps et d'espace et sa mécanique : tous les jeudis, dans la même ville, dans la même gare, mêmes horaires de trains, et personnages en arrière-plan récurrents qui créent une vraie toile de fond authentique au récit, l'encre toujours sur terre. Il y a l'homme, marié, médecin reconnu, et la femme, dont le film est la (superbement écrite) lettre intérieure déclamée à son mari, cet homme aimant à qui l'objectif est de ne surtout pas faire de mal. Cela passe donc par des mensonges, des compromis, de la culpabilité, de la pudeur (qu'un contexte social étriqué, observateur et oppressant rend nécessaire). L'amour se plie aux conventions bourgeoises, celles d'une femme qui s'interdit de l'être pleinement, celles de l'ennui et des bavardages insipides, et subit de plein fouet l'injonction à légitimité amoureuse (le mari et père des enfants demeure évidemment toujours prioritaire sur la passion naissante) par peur du scénario destructeur de sa pleine assomption.
Le film, malgré sa courte durée, surexplicite parfois trop lyriquement les sentiments dans leurs descriptions très littéraires. Mais il atteint des degrés de beauté assez inégalés grâce au jeu de ses comédiens, et particulièrement celui de Celia Johnson, dont la détresse dans le regard et les yeux régulièrement embués mouillent d'emblée les nôtres et dont la contrition face à son époux est tout simplement déchirante.
On retiendra la séquence inaugurale, bijou de mise en scène, qui d'un simple mais brillant mouvement de caméra rotatif annonce le drame à venir en captant ce qu'on devine dès lors être une scène d'adieux tue, moment superbe mais gâché par un parasite, mouvement qui annihile instantanément toute propension au suspens pour mieux laisser à ce superbe film être pleinement ce qu'il est : le récit dramatique et bouleversant d'un amour qui ne se vivra jamais.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les meilleurs films de David Lean, Journal Cinéphile de 2021, Les meilleurs films avec Trevor Howard, Les meilleurs films sur un amour impossible et Les meilleurs films de 1945
Créée
le 4 mai 2021
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