Breillat renverse les rôles : cette fois c'est une femme qui s'éprend d'un jeune homme mineur, sur un bateau entre Le Havre et Portsmouth. Le film cherche leur beauté, leur faiblesse, l'endroit où chacun cède ou semble céder. La séduction est une guerre, presque désabusée, et pourtant l'abus est le seul horizon, la trahison, le coup de poignard. Il ne s'agit pas d'aimer mais de vaincre. Utiliser, détourner, détruire - embarquer mais sur quel bateau ?
Le film est cinglant, limpide. La mise en scène oeuvre au contraire du scénario, en tournant autour des corps, en leur laissant le temps de déployer leur grâce, en cherchant quelque chose sur leur visage qui ferait un gouffre dans l'image.
Il y a un dialogue un peu long, à un moment. Breillat a essayé de faire du Eustache, mais c'est plus convenu, ça se risque moins. Je continue de penser qu'elle se sert du cinéma avec une forme d'autorité qui est un écueil ou une entrave. Comme si elle essayait d'y gagner quelque chose (la possibilité de faire un discours, de restaurer un pouvoir perdu), au lieu de plonger dans la perte avec ses personnages.