Le Brexit, j'en ai, comme tout le monde, beaucoup entendu parler. Maintenant, si ce n'est sa finalité et ses conséquences actuelles sur l'Europe, j'avoue que je n'en savais pas vraiment plus : « Brexitannia » paraissait à ce titre une bonne façon de combler ces lacunes, notamment par son choix de donner la parole au peuple, de façon totalement neutre (du moins dans un premier temps) en faisant s'exprimer aussi bien les pro que les anti. J'admets volontiers que les choix de Timothy George Kelly (noir et blanc presque austère, plan fixe, cadrage parfaitement centré) puissent déconcerter, voire ne pas convaincre (j'ai notamment trouvé les « leavers » un peu trop présents alors qu'ils ont gagné avec « seulement » 52% des voix).
Mais ce que j'aime, c'est sa cohérence. On peut les discuter, ces partis pris restent pertinents dans leur démonstration et ce que souhaite exprimer le réalisateur : un propos large, sans démagogie et tout sauf simpliste. Franchement, hormis quelques propos aberrants (mais il était logique qu'il y en ait aussi quelques-uns), il est intéressant d'observer qu'aussi fortes soient nos convictions, on ne peut s'empêcher d'entendre, de comprendre certains arguments, parfaite illustration d'une désillusion totale vis-à-vis de « l'idéal européen », d'une souffrance quotidienne face à un déclassement qu'ils ressentent brutalement. Cette défiance européenne a beau être en grande partie injustifiée, ces discours désabusés interpellent, ceux plus réfléchis, plus ouverts des « remainers » nous rassurant aussi sur notre état d'esprit.
Reste cette dernière partie, pour le coup assez engagé en faveur du maintien dans l'Union, l'intervention de plusieurs économistes, dont certains très marqués à gauche (Noam Chomsky en tête) ne laissant aucun doute sur le choix de George Kelly au moment du vote. Pour autant, difficile de les contredire tant leurs démonstrations, bien qu'un peu techniques par moments, sont imparables et régulièrement empreintes d'une belle humanité. Bref, si la forme peut se discuter, elle est totalement au service du fond pour faire de « Brexitannia » un documentaire aussi singulier qu'instructif : faire passer l'humain d'abord a souvent du bon.