"The Rock in a plane", de John Woo (et ses fabuleux producteurs <3 )
Broken Arrow, c’est un peu le moment « rien ne va plus » dans la carrière de John Woo. Ah, bien sûr, il y a le fameux Volte/Face. Mais à part ça, j’imagine le mec qui devait rentré blasé de tous ses tournages, se mettre la VHS de The Killer ou de Hardboiled en se disant « putain, pourquoi je peux pas faire ça ici... ». Broken Arrow part d’éléments classiques mais pourtant suffisant pour en faire un film d’action au moins correct. Hélas pour le maître de Hong-Kong, l’exercice n’est pas spécialement réussi.
Soyons clairs : nous nous situons dans ce qui constitue l’anti-chambre de Michael Bay. J’entends chuchoter au loin « eh mais Schaffer il aime bien Michael Bay ! ». J’ai une immense sympathie pour l’homme aux détonateurs greffés dans les mains, mais voir John Woo utiliser les mêmes procédés ne m’intéresse guère. Honnêtement je cite Bay car dans le registre de l’action du début des années 90, ça ne se rapproche pas spécialement de Donner ou du McTiernan. Je vois juste ce qui deviendra plus tard du Bay.
Effets spéciaux douteux, explosions gratuites et musique Zimmerienne sont au rendez-vous. Je ne m’attarderai pas spécialement sur le fond et sur l’écriture du film, car c’est assez vide dans l’ensemble, facile, et surtout banal. Dans certains films d’action, on se plaint d’avoir une situation de départ trop longue à être expliquée avant de rentrer dans le vif du sujet. Ici, c’est le contraire : en deux minutes, les personnages sont expédiés. Et le problème, c’est qu’une partie du film se base sur la trahison, mais cette trahison elle n’est pas efficace si nous, spectateurs, nous n’avons point d’empathie pour l’amitié qu’il y a entre les deux personnages principaux. Et puis même cette trahison est expédiée. En plus, Christian Slater, c’est pas le passager 57, donc dans l’avion, quand ça part en couille, il fait pas le malin et il s’éjecte. Youpi, comme ça au moins le déchirement « dramatique » suite à la trahison est minimisé.
Place à l’action, donc. Je parlais d’effets spéciaux pas jouasses plus haut. C’est dommage de chercher à mettre en scène un B-2 (appelé ici B-3, bon ma foi, pourquoi pas), qui est un avion qui a un pur design, qui permet une pure mise en scène, tout en ayant un savoir-faire technique en images de synthèses qui ne suffit pas. C’est dommage, mais ça sort immédiatement du film. On sent le truc expédié. En plus c’est dommage car John Woo est justement un gars qui sait insuffler de la puissance à à peu près ce qu’il veut. Mais là, non. Tout le reste du film est assez plat, et le découpage peine même à trouver une vague efficacité. Au mieux on se naviguera entre un correct/lambda, et au pire, dans un truc véritablement chiant, sans ambition. Sans l’ambition qu’a par exemple Volte/Face.
En fait ça me fait un peu mal au cœur de balancer comme ça sur John Woo. Parce qu’en plus, je sais que le type c’est une passion de cinéma incarnée. J’imagine assez aisément le mec qui s’est fait pourrir « à l’Américaine ». Pourtant, ce qu’il a réussi avec Volte/Face me donne envie de demeurer sévère. Puis bon, sérieux John, même si on te laissait pas réaliser peinard, t’aurais au moins pu diriger tes acteurs, qui sont totalement en roue libre... Là où on se console (maigrement, j’en conviens), c’est qu’on se dit qu’il y a toujours pire. Il y a Paycheck et Mission Impossible 2. Sacré Johnny !