Même si, après "Chasse à l'Homme", "Broken Arrow" permit à l'époque à certains admirateurs (impatients et infidèles) de John Woo d'enterrer prématurément le maître chinois perdu dans l'enfer du cinéma de genre hollywoodien, ce film reste un western moderne plutôt divertissant, tendant vers l'abstraction élégante et générant une belle violence cinétique et stylisée. Si l'on ajoute la superbe gestion de l'espace - désertique en particulier -, qui prouve que Woo - comme c'est souvent le cas des cinéastes "émigrés" (je pense à Antonioni ou Wenders pour le coup…) - a bien compris l'Amérique, "Broken Arrow" s'avère contre toute attente un film tout-à-fait honorable dans la filmographie de John Woo, et qui plus est, qui vieillit bien. Oui, le scénario est rempli d'invraisemblances (… mais finalement beaucoup moins que n'importe quelle saison de "24 heures Chrono", auquel on pense parfois ici), assez plaisantes quand même, comme l'ubiquité de Christian Slater. Oui, les codes du film d'action made in Hong Kong semblent ici artificiellement insérés au sein d'une sorte de vidéo-game géant. Oui, tous les moyens, même les plus exagérés, semblent bons pour John Woo quand il s'agit de faire exploser les limites du genre, de multiplier les morceaux de bravoure… Mais au final, s'il y a une bonne raison de voir et revoir "Broken Arrow", elle s'appelle John Travolta : véritablement jubilatoire dans ce premier rôle de vrai grand méchant (qu'il répétera, mais avec moins d'enthousiasme peut-être), il porte véritablement le film avec son sourire d'enfant diabolique, se réjouissant sans ambigüité aucune des horreurs que John Woo lui demande de perpétrer. [Critique écrite en 1996 et retouchée et complétée en 2016]