Autoparodie triste
Tout excité de découvrir ce Kitano dont je n'avais pas eu vent de la réalisation, j'ai lancé Broken Rage avec le sourire et l'envie d'en découdre, tant j'aime le cinéaste, celui avec lequel j'ai...
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le 15 févr. 2025
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Comme je pense bon nombre d’abonnés Prime, j’ai lancé le visionnage de Broken Rage sans trop savoir de quoi il retournait, attiré par le titre accrocheur promettant un film de Yakuza plein d’action, par la durée (1h06, parfait pour ne pas finir trop tard une soirée déjà bien entamée) et surtout par le nom du réalisateur, Takeshi Kitano.
Kitano est sans doute l’un des plus grands réalisateurs japonais, avec des films devenus classiques sinon cultes, comme Hana-bi ou encore Zatoichi. Depuis le début de sa carrière en 1996, le réalisateur compte une filmographie assez fournie de 15 films, et est un grand habitué des festivals, en particulier de la Mostra de Venise où il a glané le Lion d’Or en 1997 pour Hana-bi, le Lion d’Argent de la meilleure réalisation en 2003 avec Zatoichi, et a présenté en Compétition ou Hors Compétition Glory to the Filmmaker en 2007, Achille et la tortue l’année suivante, Outrage 2 en 2012… et enfin Broken Rage en 2024.
Avec un tel palmarès, difficile de faire la fine bouche et de passer à côté de ce nouveau cru, bien qu’il m’eût semblé passer assez inaperçu dans le catalogue Amazon. (En même temps, en sautant la case de la salle et en sortant directement sur plateforme ou en DTV, rares sont les longs métrages qui arrivent à susciter une réelle impatience).
C’est donc vierge de tout apriori que je lance Broken Rage. Première surprise, plutôt agréable, le réalisateur tient également le rôle principal (c’est plutôt la norme avec les films du cinéaste). Il incarne ici Nezumi, un tueur à gage sans pitié et sans états d’âmes, qui enchaîne les contrats à une cadence effroyable jusqu’au jour où il se fait pincer par la police qui lui propose un marché : infiltrer et démanteler un clan de yakuzas en échange de sa liberté et d’une nouvelle identité.
Un parcours plutôt classique, avec une mise en scène très minimaliste, qui va droit au but sans fioritures. L’intrigue se déroule à une vitesse de cheval au galop, sans temps morts mais aussi sans prendre vraiment le temps de développer les enjeux ou la psychologie des personnages. A ce stade, j’étais intrigué par ce parti pris, plutôt décontenancé par ces choix de réalisation et mitigé quant à la qualité du film.
Puis, un peu avant la moitié du métrage, tout s’éclaire. Les intentions du réalisateur sont mises à jour. Le film se termine, aussi abruptement qu’il a commencé. Fin du court métrage dramatique. Un carton indique le spin-off de l’histoire que l’on vient de voir.
L’intrigue reprend alors du départ, quasiment identique dans ses plans et son montage, mais cette fois-ci sur un ton comique. Comme une parodie de son propre cinéma.
La première chose qui m’est venue à l’esprit, c’est que quelqu’un de l’équipe de Kitano aurait dû lui expliquer ce qu’était un spin off : le terme de Reboot aurait été mieux choisi ! Un Spin-off est un dérivé de l’histoire principale, qui explore des personnages secondaires ou des sous-intrigues. Han Solo ou The Mandalorian sont des spin-off à Star Wars par exemple. Ici, il s’agit simplement de la même histoire, racontée de nouveau sous un prisme différent, un peu à l’image des Exercices de style de Raymond Queneau (si vous ne connaissez pas, c’est génial ! une petite histoire anodine racontée de 99 façons différentes : un vrai petit plaisir !).
Car au regard de cette seconde partie, Broken Rage ne devient qu’un exercice de style et perd de son mordant. Le charme disparaît d’autant plus que cet aspect comique est beaucoup plus culturel et difficile à apprécier d’un point de vue européen. Un exemple : la mise en scène abuse de filtres de souris, type Instagram, dont sont particulièrement friand les Japonais mais qui frôle le ridicule de notre fenêtre. Quelques petites scènes sortent du lot, mais on a globalement l’impression d’assister à un petit naufrage, où les tentatives de comique de situation (à l’image de Nezumi se cassant la figure à chaque fois qu’il s’assoit sur une chaise) font souvent pschitt.
Pas inintéressant donc, mais plutôt dommage...
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