SPOILER


Voici un film qui passe à 20 minutes du petit chef-d'oeuvre.

Si l'on met de côté quelques bizarreries (le comportement assez détendu du frère lors de la découverte de la disparition de l'enfant, le personnage incongru du proprio poète aux mains baladeuses), pendant 1h20, on a droit à un film prenant, qui tire sa force de l'incertitude dans laquelle il maintient le spectateur. Cette tension très hitchcockienne (impression renforcée par le choix du personnage féminin ou encore par l'ancienne instit en fauteuil roulant coincée dans les combles de l'école) se trouve anéantie par un final grotesque. Certains parlent de "scènes inoubliables", j'y vois un enchaînement tout à fait irritant de moments de pure gêne.

Ce dénouement est certes dans la lignée des films "psychologiques" de cette époque (pensez au lourdingue Marnie...) et révèle une vision de la maladie mentale franchement risible. On sent que ça va tourner à la farce au moment où apparaissent à l'écran le regard fixe et les gestes robotiques (mais oui, il est absent à lui-même!) du frère.

Là, la suspension consentie de l'incrédulité en prend un sale coup. Et ce n'est pas fini.

Ses dialogues avec sa soeur à partir de ce moment sont effrayants de stupidité ("Viens, on va jouer!"...mais non, assomme-le et barre-toi!). Cette dernière a d'ailleurs 50 fois l'occasion de lui foutre un bon coup de pelle en travers de la gueule, histoire de sauver sa fille, mais non, elle préfère essayer de s'enfuir en laissant la gosse cachée sous un établi ("bouge pas, je reviens", non mais sérieusement).

Dernier truc hautement improbable, et là, c'est le coup de grâce: on a là une enfant de 4 ans qui ne pipe mot pendant au moins 20 minutes, ce qui est rigoureusement impossible, n'importe quel parent vous le confirmera. Pas un "pourquoi", pas un "pipi", pas un "non", pas un "j'ai faim, j'ai été enfermée pendant des heures dans un coffre", rien.

Ca, ça vous ruine un film.

Dommage pour Laurence O. (solide), les Zombies (dans la télé) et les jolies vues londoniennes.

CyrilCht
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le 22 mars 2023

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CyrilCht

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