Il n'est jamais évident, pour moi en tout cas, d'écrire une chronique qui tienne la route pour ce genre de film. Déjà, je n'ai pas la prétention d'avoir le bagage nécessaire pour réaliser une véritable analyse critique dans les règles de l'art. Ensuite, en général, avec une telle matière, on peut discuter un peu du fond, rarement de la forme.


Pour commencer, on va évacuer une évidence : Gabriel Julien-Laferrière occupe le même poste que Steven Spielberg, mais il ne fait clairement pas le même métier. Chez lui, quand on remarque certains effets de réalisation, c'est en général parce qu'ils sont ratés, au mieux très maladroits.
Ici, je pense notamment à la première arrivée des enfants dans le grand appartement abandonné qui va devenir leur foyer. Julien-Laferrière la met en scène sur fond d'orage, dans une tentative d'ambiance fantastico-horrifique qui, en plus d'être grossièrement campée, ne sert à rien dans le propos.
Le reste du temps, la grammaire cinématographique est globalement respectée, au sens le plus classique du terme, ce qui n'est déjà pas si mal. Pour le dire autrement, le récit est fluide, le rythme cohérent, et l'ensemble du film se regarde agréablement.


Du côté des acteurs, la surprise est plutôt bonne dans l'ensemble. Les adultes semblent pour la plupart s'amuser, dans des rôles un peu clichés qu'ils investissent néanmoins de tout leur talent.
Dans le peu de scènes qu'il a, Philippe Katerine est délicieusement touchant, comme on l'aime. À l'autre bout du spectre, la folie naturelle de Chantal Ladesou dans le rôle de la grand-mère foutraque semble sous-exploitée, ou mal canalisée par le réalisateur.
Entre les deux, Thierry Neuvic, Julie Gayet et Lucien Jean-Baptiste voire Arié Elmaleh tirent leur épingle du jeu, tandis que Julie Depardieu et Claudia Tagbo manquent de matériau pour se singulariser.


Du côté des enfants, pas de performance XXL à la manière américaine - chez nous, rien à faire, les gosses sonnent souvent faux, j'ignore pourquoi. La petite bande de C'est quoi cette famille ?! s'en sort très convenablement dans l'ensemble, surtout les filles.
Dans le rôle central de Bastien, Teïlo Azaïs livre une prestation honorable, pas très charismatique mais, d'une manière étonnante, il s'avère tout de même juste et émouvant. Son personnage de gamin brillant, chef de meute et cerveau de la bande, n'est pas le plus évident à magnifier, comme souvent les rôles d'enfant sage et sérieux.


Une fois tout ceci passé en revue, reste le propos. C'est quoi cette famille ?! (titre assez naze, faut-il le préciser) pourrait être l'équivalent dans les années 2010 de Génial, mes parents divorcent ! (notez la similitude dans les titres, d'ailleurs) pour les années 1990.
Ce dernier, à l'époque, avait rencontré un vif succès, grâce à la manière humoristique et décomplexée dont il abordait la question de plus en plus prégnante du divorce dans la société. Très honnêtement, sa manière de traiter le sujet était plutôt percutante, mais c'était un film assez moyen.


Dans le même esprit, C'est quoi cette famille ?! aborde donc la question de la famille recomposée, en décuplant sa problématique par le prisme d'une famille plusieurs fois recomposée. L'exagération doit servir, ici, à souligner le caractère important du sujet dans la société moderne.
Malheureusement, son traitement reste superficiel. Plutôt que de creuser dans les blessures, les questionnements, les troubles que de telles situations peuvent engendrer, C'est quoi cette famille ?! préfère rester en surface et jouer la carte de la comédie familiale de situation à tendance "feel good".


C'est un choix qui se tient, et qui joue beaucoup d'ailleurs dans la sympathie qu'engendre le film (en tout cas pour moi). Mais qui le cantonne au rang de long métrage gentillet, de film popcorn où on s'amuse tranquillement des idées loufoques des gamins, de leur aplomb et de leur joie de vivre, ainsi que des situations compliquées dans lesquels ils plongent les adultes.


Vous me direz, avec tout ça, 6 c'est plutôt une bonne note. Oui, car j'ai passé un moment agréable, sans m'ennuyer ni m'énerver ; une performance qui, pour une comédie française, suffit à lui donner un peu plus que la moyenne.
En gardant en tête qu'un 6/10 pour Gabriel Julien-Laferrière n'a pas du tout la même valeur qu'un 6/10 pour Steven Spielberg.

ElliottSyndrome
6
Écrit par

Créée

le 17 août 2020

Critique lue 301 fois

2 j'aime

ElliottSyndrome

Écrit par

Critique lue 301 fois

2

D'autres avis sur C'est quoi cette famille ?!

C'est quoi cette famille ?!
pierrick_D_
2

Critique de C'est quoi cette famille ?! par pierrick_D_

Les enfants d'une grande famille recomposée en ont marre d'être ballottés d'un domicile et d'un parent à l'autre et décident de vivre ensemble dans un appartement où leurs géniteurs devront se...

le 18 août 2020

7 j'aime

C'est quoi cette famille ?!
Play-It-Again-Seb
3

C'est quoi cette paresse ?

Le prétexte est amusant et plutôt bien vu. Lassés de subir les conséquences des aventures amoureuses de leurs parents, des enfants issus d’une famille ultra recomposée décident de se rassembler sous...

Par

le 6 août 2023

5 j'aime

1

C'est quoi cette famille ?!
Fêtons_le_cinéma
4

Un film qui n'est pas à la hauteur du constat établi

En s’emparant d’un sujet de société très actuel, C’est quoi cette famille ?! accouche d’une production formatée et aseptisée, en dépit d’un premier segment audacieux qui laissait présager une...

le 30 juin 2019

3 j'aime

Du même critique

Un jour ce sera vide
ElliottSyndrome
6

Du trop-plein pour conjurer le vide

Pour développer ce genre d'histoire, il y a plusieurs moyens. Soit on raconte ses propres souvenirs d'enfance et, à moins d'avoir vécu quelque chose d'absolument exceptionnel qui justifie un...

le 24 août 2020

15 j'aime

3

Équinoxe
ElliottSyndrome
10

Le trac

Après le succès aussi monstrueux qu'inattendu d'Oxygène (18 millions d'exemplaires vendus dans le monde, une bagatelle), il y avait un risque certain de voir Jean-Michel Jarre souffrir du syndrome de...

le 5 févr. 2020

11 j'aime

1

1492: Conquest of Paradise (OST)
ElliottSyndrome
10

Vers l'éternité

Estimer que 1492 est le meilleur album de Vangelis peut ressembler soit à une évidence, soit à une facilité. En terme de technique et de virtuosité, ce n'est sans doute pas le cas, d'ailleurs. De ce...

le 29 mars 2020

11 j'aime

3