Le nouveau film de Rémi Chayé, à qui l’on doit le sublime Tout en haut du monde, déçoit par son propos peu subtil et ses personnages parfois trop caricaturaux.
Calamity met en avant l’enfance compliquée de Calamity Jane. Sous prétexte de parler de l’émancipation de la jeune fille à une époque où les femmes n’ont pas leur mot à dire, Chayé tombe dans les travers actuels à savoir rendre l’entourage de Calamity détestable pour qu’elle existe. Mais pire que ça, pour que Calamity exprime son plein potentiel, il lui fait couper ses cheveux et porter un pantalon. Si le port du pantalon se justifie totalement dans une scène où elle tente de monter à cheval, le concept de se transformer physiquement en garçon pour prouver qu’elle a des capacités est une erreur monumentale.
D’autant plus, la patronne de mine qu’elle rencontre, que l’amusante et touchante Madame Moustache (doublée par Alexandra Lamy), a justement gardé ses attributs féminins et prouve (en robe, bien coiffée et distinguée) qu’elle est tout à fait capable de gérer une mine et des employés. C’est le seul moment juste du film où le propos du réalisateur se fait plus subtil et du coup plus percutant.
De plus, on se rend compte au fur et à mesure de l’aventure de Calamity que le sujet n’est pas réellement celui qu’aborde Chayé puisque tout l’intérêt réside, non pas dans le concept fille vs garçon, mais plutôt enfant vs adulte. Et c’était pour moi le point central (et fort !) du film ! Or, le réalisateur n’y va pas vraiment préférant appuyer lourdement sur une Calamity très garçon manquée qui parle mal, se bagarre et boude tout le temps. Pourtant, le message du film reste bien : les enfants sont aussi capables de grandes choses et parfois de sauver les adultes. C’est bien dommage de voir que ce sujet, tout à fait pertinent et important à faire passer auprès du jeune public, est noyé dans une succession de mésaventures principalement liées aux questions de genres.
Outre le propos du film, l’intrigue en elle-même manque vraiment de peps et il est difficile de suivre une enfant si désagréable. Ses aventures semblent posées les unes à la suite des autres sans réel lien et exceptés le soldat et Madame Moustache (dont l’apparition bien trop rapide aurait mérité plus de développement), les personnages secondaires manquent de coffre (quid du groupe d’Indiens par exemple ?).
La reconstitution historique est par contre parfaitement maîtrisée avec une ambiance typique du 19ème à l’ouest des Etats-Unis. Les superbes décors sont soulignés par des dessins magnifiques et une superbe animation fluide. Les couleurs, les lumières, même les bruits et odeurs sont notables : le film est très sensuel dans le sens où il nous transporte parfaitement à l’époque et dans les lieux traversés.
Les séquences dans les grandes plaines où la nature sauvage est bien présente ou encore les traversées de rivières et rapides sont les plus réussies, car très réalistes. Et en même temps, les tons choisis donnent à l’ensemble une imagerie qui se rapproche de celle des contes (par exemple dans la forme des nuages ou le drapé du vent, les mouvements de l’herbe…) avec un réel ton poétique. Le film est vraiment très beau, techniquement maîtrisé et la réalisation vraiment léchée avec une véritable dynamique dans la façon de filmer les scènes.
CONCLUSION
Le manque de subtilité du propos et le scénario pas assez bien ficelé rendent Calamity, une enfance de Martha Jane Cannary, non pas désagréable à regarder, mais difficilement appréciable. Vraiment dommage, car la proposition visuelle de Chayé reste d’une belle originalité et prouve aussi que la 3D et les blockbusters ne sont pas la panacée de l’animation.