Canción sin nombre a l’audace de composer une forme esthétiquement très travaillée, à la photographie somptueuse et aux mouvements de caméra subtils, pour mettre en scène le combat d’une mère soucieuse de retrouver son bébé, c’est-à-dire refuser l’approche formelle réaliste conventionnelle avec sa caméra à l’épaule et sa mimèsis de l’urgence pour conférer à l’ensemble une poésie, une grâce, une âme. Il accorde fort justement aux personnages, ainsi qu’aux acteurs qui les interprètent, le premier plan, les nombreux portraits réalisés partageant la douleur dans leur silence et dans les larmes retenues. Ce que fait la réalisatrice Melina León n’est autre qu’un écrin dans lequel recueillir toute la souffrance du monde et d’un pays, le Pérou, meurtris par les enlèvements, les trafics, la corruption et la haine – voir à ce titre les attaques homophobes que subit le personnage du journaliste.
Une œuvre vibrante d’humanité et à l’image magnifique, réflexion en noir et blanc sur le Pérou contemporain écartelé entre ses traditions ancestrales et sa modernité machinale. La révélation d’un talent à suivre.