Pure bisserie interdite aux moins de 18 ans lors de sa sortie en salles en septembre 1970, Cannabis n'entretient qu'un lointain rapport avec la plante en question. Un carton pré-générique annonce par ailleurs que Cannabis n'est pas un film sur la drogue. Il est le prétexte d'un film d'amour et d'action. Néanmoins, avec son ouverture où des jeunes sont retrouvés morts par overdose dans un appartement et les quelques scènes d'orgies induites par la drogue dure qu'est l'héroïne, le métrage plonge assurément au cœur des divers trafics qui en découlent.
Serge, un tueur professionnel issu de la mafia new-yorkaise, est missionné sur Paris en compagnie d'un ponte des narcotiques. Durant le voyage, il rencontre Jane, fille d'un ambassadeur. Dès l’atterrissage, Serge et son partenaire sont kidnappés par un duo de tueurs sourds et muets. Serge réussit à fausser compagnie à ses ravisseurs et se réfugie chez Jane. Les deux tourtereaux vont follement s'éprendre l'un de l'autre...
Libre adaptation du roman de série noire Et Puis S'en Vont..., rédigé à quatre mains en 1965 sous le pseudonyme de S.F. Gilbert par Michel Fabre et Jacques Serguine (qui apparaissent tous les deux dans À Bout De Souffle de Godard), le titre Cannabis fut choisi par le distributeur afin d'attirer le public le plus large possible dans les salles. Polar ultra baroque mixé à un érotisme assez poussé, le détournement atypique et semi-expérimental du genre reste assez unique dans le paysage français de l'époque. Responsable de l'excellent téléfilm musical Anna, avec, déjà, la présence de Serge Gainsbourg à l'écran et en tant qu'auteur de la B.O, le cinéaste Pierre Koralnik offre cette fois un bis aussi décomplexé dans son fond que qualitatif dans sa forme.
Suite à l'immense succès, l'année précédente, de Slogan, le mythique et sulfureux couple Birkin / Gainsbourg remet le couvert en s'affichant délibérément plus lascif que jamais. Les nombreuses scènes où le duo s'abandonne au plaisir de la chair restent magnifiquement filmées et scandaliseront la presse bourgeoise qui qualifiera le métrage d'immondice immoral. Quoi qu'il en soit, rythmée par les géniales partitions de Gainsbourg, arrangées par Jean-Claude Vannier, qui subliment la poésie baroque attribuée aux images (avec de superbes scènes d'extérieurs shootées à New York, à l'Opéra Garnier ou encore à la soupe populaire), l’œuvre reste toujours aussi inclassable, semi-expérimentale et fabriquée sur mesure pour le célèbre couple d'artistes qui a tant défrayé la chronique à cette lointaine époque de libération sexuelle... et des mœurs en règle générale.