En 2014, les frères Anthony Russo et Joe Russo, artisans dévoués du Marvel Cinematic Universe (MCU), signent un contrat pour réaliser un troisième film sur la saga Captain America, alors que Captain America : The Winter Soldier n'est même pas encore sorti. Tels des généraux préparant une grande campagne, ils se voient confier la mission de prolonger les aventures de Steve Rogers, le soldat exemplaire et fervent défenseur des valeurs américaines. Leur engagement marque une volonté de poursuivre une épopée patriotique où l’honneur et la loyauté seront mis à rude épreuve.
Les scénaristes Christopher Markus et Stephen McFeely reviennent également après avoir forgé les récits de Captain America : The First Avenger et Captain America : The Winter Soldier. Ces écrivains aguerris doivent désormais s’atteler à une tâche colossale : adapter l’illustre comics Civil War de Mark Millar. Ce dernier relate une crise qui fissure la grande fraternité des super-héros, divisant des frères d’armes en deux factions opposées. L’enjeu est de taille : retranscrire cette guerre intestine tout en conservant l’esprit de camaraderie et de devoir qui anime les héros du MCU.
Dans cette tragédie moderne, Tony Stark, visionnaire au service du progrès, cherche à imposer un enregistrement des super-héros auprès du gouvernement, exposant leur identité pour garantir un contrôle national sur leurs actions. Face à cette volonté de régulation, Steve Rogers, porteur du bouclier étoilé et protecteur des libertés fondamentales, refuse de plier le genou. Ce conflit fratricide, où des combattants autrefois unis se livrent à des batailles d’une intensité sans précédent, rappelle les guerres intestines qui ont marqué l’Histoire des grandes nations.
En 2016, Captain America : Civil War arrive sur les écrans, quelques semaines avant une autre joute héroïque, Batman v Superman: Dawn of Justice, du rival DC Extended Universe (DCEU). Pourtant, il ne s’agira pas d’un affrontement au box-office : le MCU, fort d’une armée de films déjà solidement enracinée dans l’imaginaire collectif, écrasera la concurrence.
Dans la première partie, on ne parle pas beaucoup de la guerre civile. Il s’agit de la continuité de la relation entre le Captain et le Winter Soldier. Ces deux frères d’armes, unis par un passé commun, partagent un lien indéfectible forgé dans les épreuves et la loyauté. Bucky Barnes représentait tout pour Steve Rogers durant son enfance, un repère, un frère, un protecteur. Leur relation, enracinée dans un passé marqué par la guerre et le sacrifice, est au cœur du récit et apporte une dimension profondément patriotique à leur combat.
On reconnaît la patte des frères Russo, véritables stratèges du MCU, qui offrent des scènes d’action palpitantes et immersives. Leurs séquences de combat, précises et nerveuses, rappellent l’intensité et le réalisme des affrontements du précédent opus. Ces batailles, à la fois viscérales et chorégraphiées avec brio, captivent et témoignent d’un engagement total pour sublimer le parcours du soldat étoilé et son frère d’armes. J’aurais aimé que le film se concentre uniquement sur cet aspect, tant la relation entre Cap et le Winter Soldier porte en elle l’essence même du devoir et du sacrifice.
Cependant, la deuxième partie et l’arc de la guerre civile arrivent rapidement dans le récit, et la cohésion du film s’effrite légèrement. Si le comics Civil War révolutionne l’univers des publications MARVEL en instaurant un schisme majeur entre les héros, l’adaptation cinématographique manque d’impact. Ici, le conflit semble plus être une querelle interne qu’une guerre totale. L’absence de véritables conséquences à long terme pour le MCU fait de cet affrontement une bataille symbolique, mais dépourvue de la portée historique qu’elle aurait pu avoir. Ce n’est qu’un coup d’épée dans l’eau, un affrontement sans révolution.
Le pinacle de cette guerre civile se résume à une escarmouche dans un aéroport désert entre une poignée de super-héros. Bien que la scène soit divertissante, elle peine à retranscrire l’ampleur et la gravité du conflit initialement proposé dans les comics. Le film semble se contenter de limiter cette opposition à un duel tactique sans réelle conséquence. Il est regrettable d’avoir sacrifié un arc aussi important sur l’autel d’un troisième opus centré sur Captain America, alors que le film aurait pu se suffire à lui-même en développant uniquement l’intrigue de Steve et Bucky.
Dans le camp d’Iron Man, nous retrouvons une formation impressionnante composée de Robert Downey Jr., Don Cheadle (War Machine), Scarlett Johansson (Black Widow), Paul Bettany (Vision), ainsi que les nouvelles recrues Chadwick Boseman (Black Panther) et Tom Holland (Spider-Man). Une équipe forgée dans la modernité et la technologie, prête à faire respecter l’ordre et la régulation, quitte à sacrifier certaines libertés.
De l’autre côté, dans le clan de Captain America, nous avons Chris Evans, Sebastian Stan (Winter Soldier), Anthony Mackie (Falcon), Jeremy Renner (Hawkeye), Elizabeth Olsen (Scarlet Witch) et Paul Rudd (Ant-Man). Cette équipe incarne l’esprit de résistance et la fidélité aux principes fondamentaux de la liberté. Une empathie naturelle se dessine envers cette faction, tant elle représente le cœur même du film et porte en elle les valeurs fondamentales de la patrie et du combat pour l’indépendance.
Le troisième acte voit enfin la jonction entre l’histoire de Bucky et la guerre civile, menant à un affrontement aussi tragique qu’inévitable entre Captain America et Iron Man. Ce duel, empreint d’émotion et de tension, oppose deux visions de l’héroïsme et de la responsabilité. Le combat final est magistralement orchestré, chaque coup porté étant chargé de sens et de douleur. Ce duel ultime entre les deux figures majeures du MCU clôt le film sur une note puissante et amère, rappelant que même les héros les plus valeureux peuvent être déchirés par les idéaux qu’ils défendent.
Captain America : Civil War est un bon film sur la relation entre Steve Rogers et Bucky Barnes, mais il échoue à retranscrire l’ampleur d’un véritable conflit global entre les super-héros. Si le film avait porté un autre titre, il aurait sans doute été mieux accueilli, évitant ainsi les attentes démesurées liées au comics éponyme. En l’état, il reste un divertissement solide, mais qui ne révolutionne ni le MCU ni la dynamique entre ses héros.