Sortant d'une séance pour laquelle je n'avais aucune attentes, je me suis dit que je ne pourrais être qu'agréablement surpris. La formule Marvel fonctionne toujours autant, s'avérant très divertissante, mais cela reste malheureusement une formule, sans saveur ni grande originalité. Cette petite déception vient également du fait, qu'étant un inconditionnel fan de Marvel, je ne peux m'empêcher de m'emballer lorsque le générique apparait (parfait et émouvant hommage à Stan Lee). Décryptons donc ensemble ce nouveau long-métrage du MCU.
Commençons par parler de l'intrigue et donc du scénario, ma spécialité (étant étudiant de cinéma et ayant le désir d'en faire mon métier). Les scénaristes ont tenté de briser le schéma narratif classique des origins stories, qui devenait lassant. Le récit commence complètement décousu, à l'image de la mémoire de son héroïne. C'est un choix audacieux qui ne sera pourtant pas exploité entièrement par la suite. Le tout va devenir assez prévisible et sans surprise malgré un twist à double-tranchant.
En effet, inverser les croyances du spectateur et casser le manichéisme propre au genre des super-héros sont de superbes idées. Il fallait avoir le culot de positionner les Skrulls comme des "gentils". Mais malgré ça, un sentiment de non-satisfaction plâne puisqu'il n'y a plus de véritables antagonistes, Jude Law étant trop sous-développé pour en être un bon.
Heureusement que les personnages fonctionnent dans l'ensemble assez bien. Nick Fury est un des points forts du film. Dans la fleur de l'âge, on nous offre une autre vision du personnage, plus drôle et rafraichissante. La technologie de rajeunissement est tout bonnement incroyable et accomplit une prouesse sans bavures. J'étais vraiment impressionné, Samuel L Jackson est décidément éternel! Talos, le Skrull, est lui aussi un personnage nuancé même si son écriture mériterait plus d'attention et de développement. Ses intentions sont bonnes et tout à fait naturelles, ce qui fait qu'on s'attache à lui. Par contre, c'est dommage d'utiliser de grands noms tels que Jude Law et Annette Bening pour ensuite ne pas se servir de leur talent. Leurs personnages sont mal exploités et assez confus. Enfin, Captain Marvel, première super-héroine à avoir son propre film, fait le boulot sans transcender son public. Brie Larson livre une bonne interprétation mais reste néanmoins dans la retenue selon moi. Je pense que le spectateur aura un peu de mal à adorer son personnage car elle est beaucoup trop puissant, voire même invincible. C'est dommage, le troisième acte est dépourvu d'enjeux à cause de cela et tombe complètement à plat. On sait pertinemment qu'elle va s'en sortir, la peur de la voir mourir n'a pas lieu d'être. C'est un vrai problème au niveau scénaristique, tout héros doit avoir une faiblesse. On pourrait rapprocher Captain Marvel de Superman au niveau de sa puissance sauf que ce dernier à la Kryptonite pour le rendre vulnérable, donc plus humain. Ici, nous avons rien de tel et cela manque vraiment de piquant. En découle également le manque d'émotions, on reste assez neutre en suivant cette histoire qui se veut pourtant extraordinaire. je pense que c'est véritablement dans ce cas là que l'on peut parler de lassitude au niveau du genre super-héroique.
Mais ne nous arrêtons pas sur le négatif car il y a de vrais bonnes choses dans ce dernier film du Marvel Cinematic Universe. Ces derniers ont vraiment le don de passionner par leur univers, l'enrichissant à chaque nouveau long-métrage. C'est comme une fresque qui se remplirait au fur et à mesure en emboitant tous les détails. L'apparition du peuple des Kree et des Skrulls rajoutent vraiment de la nouveauté malgré quelques confusions dans leur rapport qui aurait mérité plus de temps à l'écran (haine des autres, guerre). Ensuite, Captain Marvel traite de thèmes, plus ou moins mis en valeur, d'une grande importance et qui fait écho à chacun d'entres nous. Je pense à la recherche de notre identité, de l'appartenance à un peuple, de la famille mais également de la difficulté de trouver un foyer, ici montré à l'écran comme une belle métaphore des réfugiés (Skrulls). J'aime quand Marvel mêle ses histoires aux problématiques politiques de notre monde, très bien fait dans Black Panther puis dans Avengers 3 par le biais des "méchants". Pour ce film, je trouve que c'est encore trop mince dans la représentation qu'il propose, cela reste trop léger pour être percutant.
Pour ce qui est de la mise en scène, on se rend compte que c'est encore une fois un des défauts de Marvel. Il n'y a pas d'âme dans ce film, pas de direction artistiques personnelles (à l'instar de Thor Ragnarok ou de Black Panther) ni de véritables intentions dans les plans. Je veux bien admettre que c'est rare dans les blockbusters actuels mais quand même ! Un petit effort ne serait pas de trop, surtout quand l'on regarde le travail de Denis Villeneuve, arrivant à croiser film d'auteur et blockbuster. Kevin Feige, le boss de Marvel, essaye de tendre vers ce but en engageant des réalisateurs venant des films indépendants mais ces derniers, trop souvent, se retrouvent bouffés, écrasés, par l'industrie et leur propre budget. C'est dommage, la mise en scène en devient donc banale et transparente. Les effets spéciaux sont corrects, piquant aux yeux dans la dernière partie du film. Encore une fois, on nous balance un combat intergalactique avec des explosions de partout et des CGI à gogo. L'épique n'est pas présent et aucun frissons ne m'a parcouru les membres. Les scènes d'actions sont d'ailleurs très banales et oubliables, souvent trop sur-cutés pour qu'on puisse apprécier les chorégraphies. La scène du train aurait pu être héroïque mais s'avère courte et son rythme est constamment malmené. Enfin, la BO est toujours aussi invisible du côté de Marvel, le spectateur se contente donc de musiques cultes des années 90, parfois sortis de nulle part et n'allant pas du tout avec la séquence, mais néanmoins jouissives.
Avant de terminer la critique, je voudrais revenir sur le caractère féministe du long-métrage dont s'est servi Marvel pour baser la plupart de sa communication à une période où le mouvement MeToo reste très important. Il faut avouer que le film présente un personnage féminin principal fort, qui n'a pas besoin des hommes et qui les malmène pendant tout le film. Le propos n'est pas forcé et semble couler de source, comme il devrait tout le temps être dans la représentation des femmes au cinéma. Il est d'ailleurs agréable de voir qu'il n'y a pas de romance dans cet origin story, ce qui prouve bien une certaine envie de renouveau du côté du MCU. Cela vient en partie de l'omniprésence des femmes derrière le projet (scénariste, réalisatrice...) Les personnages secondaires féminins suivent également le pas en étant bien développés et dynamiques, sans toutefois enlever leur part de sensibilité (Maria, la meilleure amie de Carole ou encore sa fille). Je trouve quand même qu'il en manque un peu à Captain Marvel qui se trouve parfois plus proche du robot que de l'humaine. Par rapport à ce côté là, j'ai largement préféré le personnage de Wonder Woman qui était à la fois une déesse et une humaine à travers ses sentiments, ses doutes et qui ne se retenait pas de pleurer. Oui oui, pleurer est humain ^^
Ainsi, Captain Marvel est un nouveau film (standard ?) de Marvel, divertissant mais sans grande originalité. on voit qu'il y a eu un effort pour tenter une narration plus complexe que d'habitude mais le tout retombe très vite dans le prévisible. Il n'y a rien de marquant dans ce voyage de 2h06, agréable mais durant lequel on reste complètement passif. Désormais, j'en attend plus du MCU. Ce long-métrage se place dans le milieu du classement Marvel, ni mauvais ni très bon. Il restera néanmoins plus mémorable qu'un Ant-Man 2. En même temps, ce n'est pas très difficile ! C'est fou à quel point les scènes post-génériques me font plus d'effets que le film en lui-même. Cela me rassure en un sens, le prochain Marvel, le titanesque et très attendu Avengers Endgame, va me bouleverser, me faire crier, me faire tomber. Pour mieux me relever ? Personne ne le sait encore. Encore un petit mois à passer avant cet évènement, qui s'inscrira sûrement dans l'histoire du cinéma.