Le dernier Polanski au cinéma, une adaptation de pièce de théâtre (française qui plus est !), un casting à peine croyable, pincez moi je rêve. Le réalisateur n’en est pas à son coup d’essai pour ce genre d’adaptation, ayant déjà réalisé La jeune fille et la mort dans lequel il dirigeait à la perfection Sigourney Weaver et Ben Kingsley. Les similitudes avec Carnage, voire avec son très bon Ghost Writer pour la partie centrale sont nombreuses : huis clos étouffant, personnalités qui se révèlent au gré des dialogues, secrets enfouis et regard acerbe sur les relations humaines.


Toutefois le traitement de ces différents films et leurs sujets varient grandement, ici le point de départ se prête plus facilement à faire sourire qu’à installer un suspense insoutenable. Polanski va pourtant y arriver parfaitement, juste après une introduction pas forcément indispensable mais bien menée, il se fait une joie d’éviter les écueils d’une adaptation de pièce, et installe les éléments de cette tragicomédie avec un soin méticuleux. A partir d’un banal rendez vous donné par les parents d’un enfant blessé à ceux de « l’agresseur », va se développeur un malaise qui va virer en débat puis en véritable guerre de tranchées, sans que les étapes ne soit jamais trop marquées.

Il est malheureusement difficile d’en dire beaucoup sur le film sans parler de ses rebondissements, ce que je ne me permettrai pas pour conserver les effets de surprise. Ce dont je peux parler par contre, ce sont les acteurs. Si Kate Winslet, Jodie Foster et John C. Reilly se montrent délectables dans leurs rôles respectifs, difficile de ne pas reconnaître que le génial Christoph Waltz illustre à merveille ses talents dans ce film, sans pour autant nous rappeler ses prestations précédentes.
En retrait, occupé par son travail, chaque fois qu’il lâche son portable il revient de plus belle à la charge avec de nombreuses répliques délectables, et nous confond souvent par ses sourires faux mais tellement naturels (dès le passage du clafoutis au tout début, par exemple). Je n’aurais aucun problème à le voir encore en lice pour un Oscar du meilleur second rôle.

Cependant les trois acteurs sont loin d’être en reste, et Polanski ne favorise personne, chaque personnage a droit à ses « moments de bravoure », isolés ou suivis de près par la caméra, de même que souvent filmés en plans larges très théâtraux. Il est agréable de voir que le réalisateur n’est pas limité au champ/contre champ ou aux plans larges, il alterne habilement les deux, agrémente le tout de travellings bienvenus dans les moments plus dynamiques, et film au plus près les personnages dans leur propres déchéances.


Dit comme ça, et ayant cité La jeune femme et la mort au tout début, on pourrait croire que le film est un véritable drame difficilement soutenable, mais ce n’est pas du tout le cas. Je fus le premier surpris de constater que Polanski a réussi à adapter cette pièce pour en faire un film qui soit à la fois très drôle (je pense avoir personnellement plus ri que devant Intouchables) et cruel, posant de vraies questions de fond sur de nombreux sujets difficiles, un film qui soit très accessible sans pour autant prendre le spectateur pour plus bête qu’il n’est.

Il est à noter que Polanski a su bien s’entourer sur ce film, reprenant à la musique Alexandre Desplat et à la photographie Pawel Edelman, qui avaient tous deux œuvrés sur son précédent film, et engageant rien moins que Dean Tavoularis pour la direction artistique (Apocalypse Now, Le Parrain I & II) ! Bien sûr que Polanski n’est pas le seul à pouvoir réunir ce genre de talents, mais il n’empêche que voir un film aussi jouissif et rondement mené au cinéma, c’est toujours un bonheur.

Le film dure à peine 1h20 et il est impossible de voir le temps passer tant les dialogues sont menés tambour battant presque du début à la fin, et surtout tant ils sont malins. Les personnages sont difficiles à cerner au premier abord, et on va de surprise en surprise par petites touches bien menées, un véritable régal de scénario qui lui non plus ne volerait pas sa place aux Oscars (plutôt que The Artist, si jamais quelqu’un de l’Académie me lit).

Bref du bon cinéma comme on aimerait en voir tout le temps, généreux, intelligent, divertissant et très drôle à la fois, je ne peux qu’espérer qu’il aura le succès mérité !
blazcowicz
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le 27 août 2012

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blazcowicz

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