On ronronne devant ce cat person!
Le film démarre avec une exposition assez simple : une étudiante dans une université américaine, de nature assez peureuse, influencée par les théories féministes de sa meilleure amie militante, rencontre un homme, plus agé qu'elle. Cet homme l'attire, mais il y a quelque chose de malaisant, quelque chose qui cloche, quelque chose qui va éclater, une violence sourde qui gronde chez cet homme, une tension qui monte, qui deviendra obsession et enfin terreur....
Bateau comme pitch non ? Clairement. Et c'est là toute la subtilité de ce cat person. En partant d'un synopsis de thriller lambda, il déroule en fait, sournoisement, en arrière plan, une toute autre histoire.
Car finalement cet homme, Robert, il ne fait rien. Mais dans dans les yeux de la principale protagoniste, Margot, tout se distord, tout devient violence potentielle, presque certaine. Sa meilleure amie l'influence, réinterprète tout sans cesse comme une oppression ou une attaque. Cette dernière est par ailleurs complètement en décalage dans nombre de situations sociales (la scène de l'invitation à une soirée par les deux gars costumés qui débarquent en fanfare par exemple). Margot fait des cauchemars, elle a des visions, et finalement cède à ses fantasmes en cherchant à aller poser une traceur sur la voiture de son ex. Une acmé finale qui terminera de clouer au pilori sa vision déformée du réel : les chats sortant d'une pièce sont une conclusion aussi belle que la main tendue de Robert, l'invitant à sauver sa vie.
Alors, que tirer de ce petit film ? Au delà du thriller qui bascule intelligement dans un jeu de miroirs entre les personnages principaux, il montre que tout ne vient finalement que d'une chose : la communication, et son manque. Robert n'est pas méchant, mais il n'est pas à l'écoute, la scène de sexe est juste lunaire, il ne prête aucune attention à sa partenaire. Il inflige à Margot un moment vraiment nul, et c'est ce qui bousille leur début de relation. Margot quand à elle ne lui dit pas qu'elle a changé d'avis, ni sur le moment ni après, n'explique rien, et disparaît lâchement, laissant cet homme aux prises avec ses sentiments. Finalement c'est l'enfermement dans leurs représentations du monde qui les perd (lors de la scène de sexe, Margot se réduit à une salope pour Robert, tout le temps après, Robert n'est qu'un salopard pour Margot). Une simple discussion franche, entre adultes, aurait pu tout résoudre.
Susanna Fogel arrive donc à faire descendre le féminisme sauce américaine de son piédestal, sans pour autant glorifier un machisme primaire. Elle nous montre que le monde n'est ni noir ni blanc, ni très beau ni très laid, et que la tendance actuelle qui ronge la société américaine, perdue dans sa bulle, est surtout de passer à côté de l'autre... Elle n'est clairement pas passée à côté de son film !