Deuxième film de Solovyov que je vois après le Pigeon sauvage, somptueux poème visuel qui évoquait avant l'heure le Malick de Tree of Life. Cent jours après l'enfance est sorti en 1975, soit 11 ans avant le Pigeon. Je partais donc un peu dubitatif sur la qualité de l'ouvrage, toutefois encouragé par excellentes les notes de Sasory et de Moriarty. Mais la question était "est-ce que Solovyov avait déjà fait un chef d'oeuvre avec ce film et si oui, sous quelle forme ?". Cent jours après l'enfance allait-il avoir les allures baroques et la narration éclatée qui sieyaient si bien au Pigeon sauvage ?

La réponse est non. Et c'est un peu ma déception avec le film. Si sur le fond, Cent jours après l'enfance se rapproche énormément du Pigeon sauvage, sur la forme, l'expérience reste très différente. On tient là un film plus "classique" que ce soit dans sa narration ou dans son visuel. C'est à double tranchant, le film gagne en légèreté bien sûr mais d'un autre côté, le côté élégiaque du Pigeon aurait pu se retrouver ici, le sujet ayant un meilleur potentiel lyrique (à mes yeux) que celui du Pigeon sauvage.

Sur le fond, en revanche, les films se ressemblent. Je préjuge peut-être en disant ça ne connaissant encore le cinéaste que pour les deux films précités, mais il me semble que Solovyov, et c'est à la fois sa singularité et sa grande force, filme à hauteur d'enfant. Dans le Pigeon sauvage, c'était un gamin de 10 ans la chair à vif qu'il fallait osculter. Ici, il s'agit d'un adolescent de 14 ans confronté aux tourments de l'amour. Autant dire que l'identification avec le personnage principal n'est pas bien difficile et c'est tant mieux puisque l'on va comprendre plus facilement ses réactions.

C'est cette tendance de filmer à hauteur d'enfant qui pourrait faire dire à certains que Solovyov fait dans le larmoyant, que ce n'est pas subtil, comme Waho qui l'avait reproché au Pigeon sauvage à l'époque du festival. Mais non, la force de Solovyov, c'est de ne jamais appuyer l'émotion gratuitement. Quand le cinéaste russe filme en gros plan un gamin qui pleure dans le Pigeon sauvage, ce n'est pas pour faire chialer dans les chaumières, mais pour rentrer au plus près de l'intimité de son personnage.

C'est encore l'occasion de le constater ici, le film étant plus posé et plus léger que le Pigeon sauvage, tout du moins en apparence. Parce que dans le fond, c'est la misère affective qui se substitue à la misère sociale ici, sans toutefois que ce soit appuyé ou montré complaisamment. Non, non, le film est grave mais décent.

Autre intérêt de ce Cent jours après l'enfance, intérêt qui découle immédiatement du sujet du film, c'est de constater que Solovyov filme les femmes (des adolescentes ici) de la même façon que Tarkovski. A l'instar de ce dernier, les courbes féminines sont toujours offertes en contemplation, mais pas une contemplation perverse ou phallocrate, une contemplation spiritualiste. Lena, comme peut l'être Maroussia dans le Miroir, ou Khari dans Solaris, est une icone de pureté.

Enfin bref, en deux mots, regardez-le et ceci même si le Pigeon sauvage vous a laissé dubitatifs. Le film est plus léger, déchargé "pour le meilleur et pour le pire", des expérimentations visuelles qui feront le sel de son successeur. Plus léger mais presque aussi beau.

Petit bémol cela dit pour la photographie du film que je n'ai pas trouvé aussi réussi que mes deux camarades.
Nwazayte
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le 29 août 2013

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Nwazayte

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