Faut-il voir dans la double interprétation du personnage de Conchita un simple clin d'oeil surréaliste? Ou bien l'image de la femme complète et objet universel du désir masculin, c'est-à-dire la beauté froide de Carole Bouquet associée à la sensualité d'Angela Molina? Et, si tout au long du film, le personnage de Fernando Rey ne voit aucune différence entre l'une et l'autre, c'est peut-être que l'amour et le désir rendent aveugle.
En fait, l'intérêt pour le film tient moins à cette singulière et facétieuse disposition de la mise en scène qu'à l'obsession tragi-comique d'un homme vieillissant pour une jeune vierge. Cette passion amoureuse ultime, favorisée par de bien arrangeants hasards, conduit le "vieux beau" que joue Fernando Rey à toutes les prodigalités et à toutes les imprudences pour s'attacher la belle.
Luis Bunuel semble s'amuser de la naïveté adolescente de Mathieu Faber -un autoportrait?- confronté aux promesses successives de Conchita et à ses atermoiements incessants qui trahissent sa parole et repoussent chaque jour le moment tant attendu...
La mise en scène de Bunuel peut sans doute déconcerter par l'intrusion d'effets surréalistes mais ne manque ni d'esprit ni d'élégance. Le regard très personnel du cinéaste est d'autant plus nécessaire que le sujet de l'homme en automne et de la femme au printemps à été maintes fois abordé.